W-Fenec


Interview réalisée par mail par Djaycee au mois de Janvier 2023


Quelle est la genèse du Mag ?
Oli : Il y a d'abord eu un site internet pour combler un vide : le rock était très peu présent sur la petite toile francophone en 1998. Le Mag est apparu il y a un peu plus de 10 ans, c'est une manière de garder de la motivation et de changer de rythme, on bosse quand on veut, il faut juste que tous les 2-3 mois, le contenu et le contenant vaille la peine d'être affiché au grand jour !
Gui de Champi : si nous n'étions pas passé au format Mag il y a dix piges, nous ne serions pas ici à fanfaronner. Avec le recul, le passage à ce format a sauvé la vie de l'institution W-Fenec.

Quel est le secret de votre longévité ?
Oli : La passion et ne pas trop se poser de question sur l'avenir. On avance jour après jour sans se mettre d'objectif comme ça, on n'est pas déçu !
Ted : La liberté, une passion intacte, et une équipe motivée, soudée et sympathique.
Pooly : La flexibilité, on chronique, interview un peu qui on veut et quand on en a le temps.

Y a-t-il des limites à vos sélections d'artistes ? Il paraît que par exemple vous n'êtes pas fan de rock parodique...
Oli : Il faut que ça nous plaise avant tout, la sélection est donc naturelle ! ULTRA VOMIT, c'est parodique, non ? On adore.
Ted : Je suis obligé de m'en poser, oui, car on a une ligne éditoriale dont le cœur est le rock. Et comme j'écoute plein de styles musicaux, pas le choix. C'est rare par exemple que j'aie pu chroniquer du jazz. Jazz-rock, ça passe, mais pas jazz, tu vois la nuance ? Pareil pour la musique africaine, sud-américaine, arabe... Heureusement qu'il y a des limites aussi, sinon, on ne s'en sortirait pas je pense.
Gui de Champi : la seule limite que nous nous imposons est qu'il faut que l'artiste nous plaise. Sans cela, on ne prendrait pas de plaisir. Je ne te cache pas qu'il m'est arrivé de chroniquer d'une manière décalée un disque que je ne trouvais pas terrible, mais ce n'était pas préjudiciable à l'artiste (qui n'aura jamais vent de cette chronique) et c'était pour le fun. Pour le rock parodique, on peut considérer que MARCEL ET SON ORCHESTRE ou LES AMIS D'TA FEMME ont bien été mis en valeur sur le W-Fenec. On ne va pas en faire trois fromages, hein ?
Pooly : J'ai toujours voulu faire une chronique de classique en fait. Mais au final, il faut quand même que ça s'inscrive dans une ligne éditoriale, je ne vais pas chroniquer Bobby McFerrin sans rien autour.

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25 ans c'est plus ancien que Nawakposse, il n'y a pas un moment où il faut écouter de la musique d'adulte ?
Oli : Sans rire, c'est un truc qui m'angoisse un peu, est-ce qu'on ne devient pas ce que je critique chez d'autres ? On aime des groupes, pas mal d'entre eux sont aussi âgés que nous... Est-ce que ça correspond toujours au rock d'aujourd'hui ou pas ? Pendant ma prime jeunesse, ma référence en terme de mags rock, c'était Rock N Folk, les gars font encore des couv' sur les BEATLES et David Bowie, j'ai pas envie de devenir un mag "passéiste". Et plus sérieusement, le rock, c'est une musique de vieux, non ? Mes parents en écoutent toujours...
Ted : On est ce qu'on écoute, non ? Mais ceci dit, je connais des "vieux" rockers qui veulent me faire écouter des trucs parfois douteux. Finalement, le rock évolue sans vraiment évoluer. Parfois, il y a des sorties pour lesquelles je me demande si ce ne sont pas des rééditions/remasters d'albums sortis durant des décennies lointaines. Le retour au passé est absolument logique. Rien que dans le hip-hop, ça stagne depuis longtemps, pourquoi pas le rock ? Le rock a eu son heure de gloire.
Pooly : Tu veux dire de la musique de jeunes ? Justement c'est là où il y a une pléthore d'artistes, et non pas des croulants.

Parmi les membres d'origine, quels sont ceux qui sont toujours dans la rédaction ?
Oli : À l'origine, on n'est que deux et les deux sont toujours là. Pour le lecteur, Pooly n'est plus forcément très visible mais il assure un boulot de fou sur le site internet, tout est "automatisé" par des robots qui répondent à des codes et c'est lui qui gère tout ça. Moi, je signe des articles donc ma présence est plus évidente. Le troisième à avoir rejoint l'équipe, c'est Gui de Champi, il est toujours là aussi !
Gui de Champi : pendant de (trop) longues périodes d'inactivité, j'ai pensé arrêter, ne serait-ce que par respect envers la team. J'ai dû en parler une fois ou deux à Oli qui a dû me répondre, avec sa délicatesse légendaire : "démission refusée".

Pourquoi toujours utiliser du matériel promo physique ? Il y a 25 ans, cela marchait comme cela mais depuis Myspace, c'est de plus en plus dématérialisé ?
Oli : Outre notre âge avancé, une des raisons de ne chroniquer que des disques reçus "physiquement" est simplement de faire un premier tri. On a déjà du mal à tout écouter correctement quand c'est reçu par La Poste, alors s'il fallait ajouter les 10 "albums" reçus en lien chaque jour, ça deviendrait impossible. Le W-Fenec est une passion à laquelle on consacre un peu de notre temps libre. Écouter tous les trucs en stream, ça nous prendrait plusieurs heures par jour ! Outre le temps perdu et les conditions d'écoute pas toujours optimales, l'investissement dans le projet est assez limité si tu ne fais qu'envoyer un mail vers ta fiche Spotify, ton Bandcamp ou ta playlist Youtube. Si tu crois en ton album, si tu penses que notre média vaut le coup, alors envoie un truc physique, crée un vrai contact.
Ted : Oui, il faut du donnant/donnant, et les PR/labels/groupes envoient toujours du physique donc on n’a jamais eu de problèmes sur ce point. J'ai l'impression que là où ça devient plus compliqué maintenant, par rapport à il y a 25 ans, c'est pour obtenir des accréditations live/photo ou les interviews en direct avec les artistes, c'est un bordel monstre des fois, sauf si bien sûr ils sont plus "petits" et francophones. Certains "gros" n'ont même plus vraiment besoin de couverture médiatique.
Pooly : Parce que des fois tu n'as pas de réseau !

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Vous préparez un mag anniversaire avec des anecdotes, il y en a d'autres qui n'étaient pas publiables ?
Oli : Oui, certainement, celles qui ne sont pas très amusantes ou que l'on juge peu intéressantes.
Gui de Champi : j'ai une anecdote que j'ai failli raconter dans notre encart 25 ans, mais réflexion faite, je préfère raconter cette histoire les yeux dans les yeux histoire de rigoler un bon coup. Thomas des BURNING HEADS et FOREST POOKY raconte aussi très bien cette histoire !

Y a-t-il des regrets après 25 ans ? Des choses qui n'ont pas été possible à réaliser ? Oli je sais que tu as fait un A/R Lille-Paris pour aller interviewer TOOL en étant prévenu le matin pour l'après-midi... mais on n'est pas toujours dispo ?
Oli : Je pars du principe que depuis 25 ans, tout ce qui m'arrive en lien avec le W-Fenec, que ce soit les albums qui atterrissent dans ma boîte aux lettres, les concerts auxquels j'assiste ou les rencontres que je fais lors des interviews, tout ça, c'est du bonus ! On est des privilégiés. Ç'est cadeau ! Il y a des centaines de concerts où on était invité et où c'était certainement très bien mais pour X ou Y raison, on n'a pas pu s'y rendre, c'est comme ça. Soit tu choisis de le regretter, soit tu te dis que tout ce que tu as fait et feras est une chance incroyable et qu'il faut continuer d'en profiter.
Gui de Champi : un de mes regrets (également dans la vie de tous les jours) est de ne pas maîtriser la langue anglaise. Du coup, quand je dois interviewer Frank Turner, les WILDHEARTS ou ALICE IN CHAINS, je prépare les questions et ma femme Tiffany mène l'entretien. On forme une bonne équipe ! Ted : Le regret de ne pas avoir été dans l'équipe plus tôt en tant que chroniqueur. J'aurais pu économiser de sacrés billets de concerts ahaha.

Des anecdotes sur les membres de la rédaction ?
Oli : Gui de Champi ne tient pas la bière, un comble pour un fan de MOTORHEAD !
Ted : No comment.
Gui de Champi : j'ai bien quelques anecdotes, mais pour le coup, Oli, avec sa délicatesse légendaire, pourrait me dire : "finalement, démission acceptée".

Vous serez où dans 25 ans ?
Oli : Bonne question ! Perso, j'espère être à la retraite ! Est-ce qu'à 70 ans, je chroniquerai encore des albums ? Aucune idée mais il y a 25 ans, je ne pensais pas qu'à 45 ans, je serais encore aussi investi. Philippe Manœuvre ou Zegut démontrent qu'il n'y a pas d'âge pour transmettre sa passion.
Ted : Je vais aller prendre RDV avec un voyant et je reviens.
Gui de Champi : dans 25 ans, j'écouterai encore du rock, c'est sûr. Et nous fêterons avec Guillaume Circus la 25ème édition du fanzine HuGui(Gui) les bons tuyaux. Bref, je pense être encore dans le circuit...enfin, j'espère.
Pooly : Dans une pièce avec deux grosses enceintes et de la musique à plein tube.

Rendez-nous JC à temps plein !
Oli : On n'arrive pas à s'en débarrasser ! Le gars a vu de la lumière, il est rentré et a posé ses valises ! Comme chacun des membres, il est libre de faire ce qu'il veut ! J'ai participé à de nombreux autres zines quand j'avais du temps (Sefronia, Presto!, Funcore...), j'ai même pigé pour Rock N Folk, tant qu'on est motivé et qu'on se sent bien, pourquoi se priver ?
Ted : On fait comment au fait pour la garde ? Plus sérieusement, JC, c'est un vrai bonheur de l'avoir, je le trouve parfois complètement fou avec sa volonté absolue de photographier presque tous les soirs. Il faut qu'il se ménage.
Gui de Champi : Hé, Nawak, il va falloir vous faire à l'idée que JC nous appartient (même si Guillaume Circus a du mal avec la notion de propriété) et qu'on lui laisse un peu de temps pour s'occuper de sa famille et écrire quelques articles pour vous.

Le mot de la fin ?
Oli : Merci ! C'est quand votre anniv' vous, il me semble que vous n'êtes pas tout jeune non plus...
Ted : Merci pour votre soutien les gars, vous faites partie de l'histoire aussi.
Gui de Champi : merci pour l'intérêt porté à nos activités. C'est toujours bon de savoir qu'il reste encore des activistes comme vous qui ne lâchez rien. En ce qui nous concerne, ça fait longtemps que c'est un robot qui écrit nos articles, alors, gardez encore un peu d'humanité dans ce monde de brutes.
Pooly : Fin.