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Interview réalisée par Djaycee par zoom au mois d'Avril 2021.
Photos live réalisées par Unkle Z Photography


Bonjour, merci de nous accorder cette interview. Elle est un peu spéciale pour moi car je me souviens du festival rock à Paris où tu avais joué avec FFF il y avait les NO ONE IS INNOCENT, L7, HELMET, RATM... Et ça reste pour moi un des concerts fondateurs qui m'a donné envie de faire des interviews et des live-report. En tout cas, c'est un plaisir pour moi et d'autant plus pour ce nouvel album. Peut être qu'on peut commencer par l'artwork, par la pochette, puisque c'est une sorte de patchwork sur lequel on va pouvoir partir un peu sur toutes les chansons. Comment s'est faite la création de la pochette ?
Ecoute pour la pochette de cette album, j'avais envie de partir sur tout autre chose que pour Le premier. Et à tous les niveaux le packaging, la pochette, le code couleur. C'était très noir et blanc, assez sobre, assez classe. C'était une magnifique photo de Jean-Baptiste Mondino. Mais là, pour cet album là, j'avais envie d'un truc différent. J'avais envie de couleurs. J'avais envie d'un truc qui flashe plus et qui soit, un peu à l'image de l'album, c'est à dire très coloré, qui peut aller dans beaucoup de directions. Et je ne savais pas trop qui contacter. Il se trouve qu'on est tombé avec Caroline, ma femme, sur l'Instagram, d’un groupe de musique qui s'appelle OMAR JR. - je t'invite d'ailleurs à aller voir leur compte Instagram. Et c'est effectivement une espèce de fresque sans fin à base de collage. Je les connaissais donc on les a appelés, notamment celui qui est dans la partie graphiste du groupe et qui s'appelle Fabrice.
Son nom de graphiste c'est S4V4G3 [à prononcer SAVAGE] Et on s'est vu, je lui ai fait écouter l'album, en a parlé et très rapidement. Deux jours plus tard, il m'a envoyé une première ébauche qui était cette pochette. Là, on a modifié quelques petits détails, mais grosso modo, ça a été très rapide et on a tout de suite fait " Whaou ". C'est son idée d'ailleurs à lui d'avoir mis les petits détails de chaque chanson sur la pochette.

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J’ai le dossier de presse sous les yeux. Il est effectivement assez évocateur. C'est vrai que tu as parlé du disque précédent. Et effectivement, ça tranche par rapport par rapport à l'album précédent et je me suis demandé : quelle est l'orientation du disque ? Et il y a un côté kaléidoscope, mais surtout pour rattacher au Parc des Princes, en 1996. Il y a les amis de FFF qui viennent soit poser des lignes de basse, soit pousser la chansonnette. Donc, c'est aussi intéressant de parler de tous ces guests puisqu'il y a KOKOMO de Nantes également, qui sont Nantais. Et puis un chanteur de la Réunion. Donc, je ne sais pas si tu peux nous faire peut être une visite guidée de certains titres par le prisme des guests.
Bah oui, en fait, c'était pareil. C'est une idée qui est venue en travaillant sur l'album, je me suis dit " Tiens, ça serait marrant d'avoir quelques invités sur le disque ". Ça a commencé par mon ami LINDIGO - Olivier Araste, qui est un chanteur qui représente la nouvelle scène du maloya à la Réunion. Le maloya, c'est un peu la musique traditionnelle réunionnaise, dérivée évidemment des rythmes africains avec des instruments de Madagascar. C'est une musique en général plutôt très percu'. C'est surtout percus/voix, en général le maloya traditionnel. Il a un groupe avec lequel j'ai travaillé par le passé. On a fait des concerts ensemble plusieurs fois et c'est un mec que j'adore. J'adore leur musique et en fait, ils étaient à Paris quand on travaillait sur le mixage de l'album et je l'ai invité à passer studio et je lui ai dit " Tu n'as pas une idée? ". Il y avait une partie instrumentale sur la chanson qui s'appelle " Margarita ". On savait pas trop ce qu'on allait mettre sous l'eau. Après, il nous a pondu une petite en intervention vocale, une petite phrase qui était vraiment hyper cool. Et on s'est dit que ce serait bien d'avoir aussi d'autres invités.
Et notamment, il y avait une chanson qui s'appelle " The detonator " que je chantais à la base avec Victor MECHANICK, avec qui j'ai travaillé sur cet album, et qui est mon acolyte musical en ce moment. Et on s'est dit que ce serait bien que le mec de KOKOMO vienne posé sa voix. Le duo vient de Nantes, un duo guitare/batterie et le mec a une voix extraordinaire. Il a une voix très haut perchée, un petit peu, Robert Plant, très aigue. On a presque l'impression parfois qu’il ne chante pas à la même vitesse. Il a un peu accéléré et Victor chante aussi un petit peu souvent dans les aigus. C’est pour cela que la voix du mec de KOKOMO collait parfaitement sur cette partie là. Donc, je l'ai appelé et il est venu à Paris on a fait cela ensemble, c'était top. Il a fait le solo aussi sur la chanson. Ensuite, du coup, je me suis dit maintenant, c'est cool que l'on ait des invités. Donc, j'ai appelé Lescop, avec qui j'avais travaillé sur les paroles des textes en français de l'album. Cette chanson s'appelle " La pluie ". Une ballade et un très beau texte qu'il écrit donc. Je lui ai proposé de venir chanter sur cette chanson. C'était super avec un côté un peu duo à l'ancienne. Un peu " The rat pack ", à la Française type Maritie et Gilbert Carpentier, quand il y avait des duos.
Il y a effectivement un côté vintage, une touche de variété.
Donc, évidemment, je me suis dit s’il y a des guests je ne peux passer à coté d’un feat de Marco et donc que Marco Prince le chanteur de FFF est venu lui sur le dernier titre de l'album " Television " et il a balancé des petits hurlements dont il a le secret, rugissements même.
Effectivement des petits rugissements qui nous manquent. C'est vrai que le fait de lire ça dans la bio FFF et que Marco était présent, cela rappelle des souvenirs et on se demande s’il est prêt à reprendre un petit peu le chant ou c'était plus par amitié envers toi ?
On a fait quand même pas mal de trucs ensemble depuis 7-8 ans. On a fait pas mal de concerts en 2014 2016 et 2017, on a fait plusieurs tournées, on a rejoué à Paris. des Concerts fabuleux, d'ailleurs, on a refait la cigale, on avait joué au Bataclan Et puis on s'est retrouvés avec le constat " bon qu'est-ce qu'on fait ? Il faut qu'on fasse un nouvel album, de nouvelles chansons " et là, c'est devenu plus compliqué. Monter sur scène tous ensemble pour jouer les chansons de l'époque, ça a toujours été le le pied absolu. On s'est toujours éclaté à faire ça et c’est un énorme bonheur de refaire de la scène. Mais refaire de nouvelles chansons, c'était devenu plus compliqué il y en avait qui avait plus le temps, l'autre moins de temps, l'un inspiré, l'autre moins. Tu vois c'est devenu un process un peu plus laborieux qu'on l'imaginait au début. Du coup, on a mis de côté pour l'instant et pour ce qui ne veut pas dire qu'on ne le fera pas un jour mais pour l'instant c'est en stand by.

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Si on parle un peu du contexte, ce n'est pas un peu piégeux de sortir un album en plein Covid, sachant que maintenant, avec l'industrie du disque, ce qui rapporte le plus, c'est le merch' et les tournées. D'autant qu'on n'a pas énormément de visibilité sur les dates et même celle de novembre à Paris ?
Ecoute on s'est évidemment posé la question mais après, c'est pas ça qui va nous empêcher de faire de la musique. C'est pas ça qui va nous empêcher de la faire écouter aux gens. Et puis, si tu veux, il y a des gens qui ont reculé leur disque qui devait sortir en mars dernier. Reculer pour sortir en juin, puis en fait, ils ne sont pas sortis en juin non plus. Donc, du coup, ils ont reculé pour sortir en septembre et ils n'ont pas de sortie. Donc, il faut les sortir les disques parce qu'on ne sait pas combien de temps cela va durer. Moi, j'en ferai un autre un disque. Celui-ci est un disque qui s'est fait d'une manière assez naturelle, assez spontanée. Donc je suis déjà en train de travailler sur le prochain, d'y réfléchir et je vais pas attendre. En plus, du coup, il y a ce risque qui est que effectivement, il y a pas mal de gens ont retardé leur sortie. Du coup, tout le monde va sortir en même temps. Donc oui, on s'est posé la question, mais pas longtemps. Ça nous a paru évident qu'il fallait que le disque sorte. Et puis que les concerts cela viendra après.
Je pense que c'est une bonne idée car c'est vraiment un kaléidoscope avec plein de lumière et il fait du bien au moral. C'était vraiment un plaisir de l'écouter en avant-première. Autre problématique puisque finalement, ce kaléidoscope avec tous ces invités c'est quelque chose que tu comptes faire sur scène ?
C'est encore trop tôt pour y penser. Ça va dépendre des emplois du temps de chacun. Oui, c'est sûr que dans ma volonté, j'aimerais bien que les invités qui sont sur l'album participent aussi aux concerts. Après, je ne peux pas le dire, j'en sais rien, mais ça va dépendre du planning de chacun qui est dispo, qui a envie de le faire. Mais oui, je pense que j'aimerais bien voir les copains.

Au niveau de la composition, tu dis je suis allé chercher LESCOP. Comment s'est faite la compo ? Quand tu vas chercher la personne, est-ce que tu as déjà un bout de composition pour dire finalement LESCOP, " Quelles paroles tu mettrais dessus ? " Ou tu pars des textes ?
En général, je fais la musique avec des textes en anglais plus ou moins aboutis d'ailleurs. Et en fait, si tu veux là, c'est ce qui s'est passé. J'avais presque tous les textes en anglais et j'ai envie de faire des morceaux en français parce que c'est que j'aime, chanter en français, parce que je trouve que l'exercice n'est pas facile et que quand on y arrive, c'est vraiment différent et c'est assez original de faire du rock en français. Du coup, je me suis retrouvé à un dîner organisé par mon tourneur, Alias. C'était fin 2019 et il font tourner aussi Mathieu Lescop. On se retrouve assis côte à côte.
- " Et toi, tu fais quoi en ce moment ? " - " j'ai mon groupe et toi, tu fais quoi ? "
- " Moi, j'ai mon album, mais j'aimerais bien avoir des textes en français. "
- " Tu veux que j'essaye d'en faire avec toi ? "
- " Ben ouais, carrément, et bien viens à la maison "
Et cela s'est fait très simplement. Donc on a échangé nos numéros de téléphone et on s'est vu ensuite, il est venu à la maison et on a bossé ensemble sur une première chanson. On a été très contents du résultat, puis on a enchaîné. Pour la chanson qui s'appelle " Crocodile " par exemple on avait déjà le titre. On aurait pu changer, mais il se trouve qu'on aimait bien le titre et du coup, ça collait bien avec le reste du texte. Mais oui, il avait déjà des bribes de textes.
Peut-être peux-tu détailler un peu l'anecdote de la chanson qui s'est faite quand tout le monde avait bouclé suite à un enregistrement…
Cette chanson s'appelle " La pluie ". Et c'était effectivement après une séance de travail ici (à son studio Ndlr) en quatre jours. Juste avant de partir, pendant qu'on était en train de ranger le studio et de préparer notre départ. Victor s'est mis au piano. Il a trouvé cette grille d'accords et on a rebranché les micros et les trucs pour enregistrer le squelette de cette chanson. Et nous avons continué à bosser dessus très rapidement. Mais oui, c'est vraiment un truc qui est sorti comme ça, en moins d'un quart d'heure, on a plié, on va faire un tour dans le studio pour être sûr qu'on n'oublie rien et là quatre accords qui nous scotchent.
C'est effectivement intéressant de voir ces anecdotes dans le dossier de presse. Ce qu'on voit aussi et qui n'était pas flagrant pour moi, c'est que tu parles de toutes tes influences. On voit des groupes comme PHOENIX, BEASTIE BOYS, FRANZ FERDINAND, on parlait de KOKOMO. Qu'est-ce que tu as écouté pendant le confinement ? Est-ce qu'il y a des choses un peu différentes peut-être qui t'ont inspiré ou amené vers des choses qu'on n'a pas l'habitude d'entendre de ta part et que tu as finalement mis sur le disque ?
Pendant le confinement on a écouté pas mal de rock un peu " MOR- middle of the road ", du Rock FM, tu vois des choses un peu soft rock des années 80. On écoutait beaucoup LITTLE FEAT. Aussi on a écouté beaucoup GRAHAM NASH. On écoute toujours plein de trucs aussi des disques brésiliens des années 70, des albums de JORGE BEN assez dingues, notamment l'album éponyme avec une pochette que j'ai un peu prise comme référence pour l’album. On a écouté aussi de trucs assez variés.
(Sa femme entre dans le studio)
C'est une de tes sources d'inspiration, j'ai vu qu'il y avait une chanson que tu as dédié un à ton fils et ta femme ?
Yarol : oui " Hot like dynamite ", c'était un petit couplet pour les gens qui comptent et qui sont importants pour moi.

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J'avais lu une interview de MIOSSEC qui disait qu'avec les chansons qu'il avait écrites pour JOHNNY, il avait gagné plus que sur toute sa carrière. Si c'est le cas, est-ce que ça permet de s'ouvrir un petit peu et de se dire finalement, on m'attend moins sur des albums et je peux livrer des choses un peu plus personnelles, comme ce disque là, ou ça n'est pas du tout lié à ça.
Et il se trouve que MIOSSEC, a écrit beaucoup de chansons, beaucoup de paroles, comme les albums que JOHNNY a sorti avant. C'est sûr que ça représente des droits d'auteur assez conséquents. Moi, je n'ai pas écrit tant que ça apporte JOHNNY. Moi, j'ai co-écrit quelques chansons avec mon ami, Maxime Nouchy (YODELICE) mais ce n'est pas assez pour te permettre de rouler sur l'or. Tu le disais toi même c'est compliqué le milieu de la musique. Gagner sa vie en jouant de la musique et c'est assez tendu, surtout quand on constate ce qui concerne les ventes de disques. Voilà, on le sait tous que c'est pas moi. Ce que j'espère, c'est que les gens, ça va leur plaire qui vont aimer le disque qu'ils vont avoir envie de l'écouter. Si j'arrive à en vendre un petit peu et gagner trois sous avec, tant mieux. c'est pas fait dans un but mercantile en tout cas.
Je crois que MIOSSEC avait fait l'interview. Il n'avait que deux ou trois chansons à son actif pour JOHNNY et disait que c'était bien d'écrire pour JOHNNY, parce que ça lui laissait ensuite plus de liberté pour ses projets persos.
L'album on l'a sorti sur mon label. On a juste un distributeur. C'est effectivement la liberté. Mais après, il y a des labels qui sont supers aussi. Ça dépend des gens avec qui tu bosses. Oui je comprends ce qu'il veut dire.

Tu parles du label indé verrouillant de plus en plus de maillons de la chaîne. JOSEPH D'ANVERS a monté son propre label. C'est juste un logo à l'arrière du disque, mais il y a vraiment plus de liberté quand on mène les choses de A à Z ?
Ça dépend déjà de quel label on parle tu vois. C'est sûr que les majors, si tu veux, c'est les majors. Quand ça marche, si tu es chez Universal, par exemple et si ton truc commence à cartonner, vraiment un vrai carton et que ça marche très bien. Les majors ont une force de frappe quand même et ils ont des moyens qui fait que ça peut marcher encore plus. Par contre, les majors. Le problème, c'est que souvent, quand ça ne fonctionne pas du premier coup, ils n'ont pas le savoir faire, un petit peu " démerde " ou underground que peuvent avoir des petits labels indépendants qui ont plus de petites idées un peu décalées pour faire exister un projet quand même, si ce n'est pas le carton commercial certifié . Oui, c'est sûr que si ça marche, les majors c'est bien. Si c'est un projet plus underground, un peu plus pointu musicalement tu n'es pas forcément mieux dans une major.
Surtout que j'ai l'impression que l'on arrive à faire beaucoup plus de choses en do it yourself, avec des mini studios qu'on ne pouvait pas faire il y a 10 ans...
Et les trois quarts des disques aujourd'hui sont faits sur des ordinateurs portables. C'est sûr que les progrès ont été faits dans les logiciels d'enregistrement ou de création musicale sont énormes et c'est super. Mais ça a démocratisé vachement de trucs et malheureusement c'est un peu la mort des gros studios. Il y a plein de studios intermédiaires qui mettent la clé sous la porte. C'est dommage, mais après, ce qui est génial c'est qu'effectivement avec un investissement minime, tu peux faire un disque chez toi qui peut-être dément ce qui n'était pas le cas il y a une vingtaine d'années.

Je termine toujours par cette question.
Quelle est la question que je ne t'ai pas posée et à laquelle tu aurais souhaité répondre ? Quelle est la réponse à celle-ci ?

Oh la la! (rires)
J'avais prévenu...
Quand est-ce qu'on va jouer au Hellfest ? (référence à mon fond d'écran zoom). J'aimerai vraiment jouer au Hellfest mais je ne sais pas si on est assez " Hell ". Mais elle me donne super envie ta photo derrière toi de rejouer dans un festival et en plus au Hellfest.

Merci pour ton temps et cette interview.
Merci à toi.

Merci à Yarol et à Thibault