Les 3 Fromages


Interview réalisée par Djaycee au Hellfest Corner à Paris en Janvier 2022.


Bonjour. Merci de nous accorder cette interview. La question du moment, comment avez-vous vécu ces deux dernières années ? Est-ce que cela a été propice à la composition ou au contraire à un repli sur vous-même ?
Éric : Justement, en fait, ça a été une pause obligatoire pour tout le monde et donc, du coup, une pause qui n'était pas culpabilisante pour nous. On était plutôt enjoué de cette pause pour pouvoir composer à avoir le temps de se poser et de faire bien les choses et ne pas être dans le temps, dans le jus, dans le speed. Et donc, on a vraiment profité. En fait, c'est cette espèce de pause obligatoire, nous a permis de sortir un album.

D'accord, parlons peut-être de la pochette. Comment s'est fait le choix ?
Kevin : Avant de penser pochette, nous avons pensé titre de l’album. Donc, ça a été " V " parce que c'est le cinquième album. Éric : On cherchait quelque chose de très simple, très sobre, mais assez marquant, qui reste en tête. Et on s'est dit un seul mot. C'est tout aussi bien. On s'est dit cinquième album. Pourquoi pas " V " ? Tout simplement. On a cherché d'autres idées. Puis finalement, on revenait sur cinq. Ce qui peut être sympa, c'est ça que je peux juste écrire. Ça, on le met en chiffres romains. Résultat d'un côté, on est parti sur la photo. On s'est dit qu'on pouvait faire le signe de V avec les doigts. Puis on s'est dit ce n'est peut-être pas terrible, finalement. Kevin : Avec le titre en chiffre romain, il y avait toute une imagerie mythologie gréco romaine qui pouvait être sympa à mettre en scène et de de nous afficher, en dieux romains, avec un espèce de... Comment appelle-t-on cet endroit ?
Thibault : Un temple ?
Kevin : Non, l'Olympe.
Éric : les Champs Elysées. On est parti là-dessus et ça nous offre quelque chose d'original.
Thibault : On pense qu’elle ne ressemble pas à ce qu'on a fait avant et en tout cas, je sais pour qui je voterais, si je devais voter pour un des dieux mais aussi pour les élections. J'ai bien mon idée derrière tout ça.

Les 3 Fromages

Donc, on peut peut-être parler également des deux premiers sigles avant-coureurs de l'album et des clips qui vont avec. Si on parle de l'album, c'est un peu un kaléidoscope, avec énormément d'influences et énormément de styles que vous copiez, et que vous poussez à la dérision. Mais concentrons-nous déjà sur les sur les deux premiers singles.
Éric : Des titres qui restent quand même une grosse base rock. L’album dans sa totalité reste rock. Même si des morceaux sont plus pop, ça reste quand même une grosse base rock, même dans les chœurs, dans la façon de chanter, dans la façon des harmonies et de la fédération de certaines chansons.
" Reviens " est un morceau très typique pop punk, 3 FROMAGES. On va dire que qu’on apporte une touche moderne à des choses qui fonctionnent aujourd'hui aux États-Unis et pas forcément en France. Mais en tout cas, on est très influencé par cette musique américaine et moderne. Donc ça nous correspond bien au niveau du son, en tout cas. " Reviens ", je crois que c'était un de nos morceaux préférés. Et du coup, on s'est dit il faut qu'on fasse un clip dessus, qu'on sorte en premier parce qu'on avait hâte de le montrer aux gens et donc que le public se l’approprie. Le clip, on s'est amusé avec Mathieu Ezan à faire une histoire avec un petit scénario. Et puis, je suis allé en studio faire une performance pour jouer. Et puis, on a des acteurs dans le clip Louis Boulet et Anna Pia. Et ils ont joués, ils se sont pris au jeu du thème de la chanson. C'était super. C'est vraiment un tournage vraiment fun et ça va vraiment avec la chanson, avec le délire. Donc cela, c'était bien cool. Et puis " on est le monde ". Je vous laisse en parler…
Willy : " On est le monde ", c'est un des premiers morceaux qu'on a composé. Puis on trouvait ça amusant, donc assez automatiquement même si je ne sais pas pourquoi, mais on l'a visualisé un peu comme un morceau un peu émouvant et comme une grande balade de variété. Du coup, pour ça, ça nous faisait penser effectivement à ce qui est peut-être un peu cliché " We are the world " ou même LES ENFOIRES. Donc, il y avait déjà une idée qui pouvait être visuelle par rapport à cela et donc une prédisposition à faire un clip parodique de ce genre de choses. C'est comme ça que ça nous est venu, ça plus les petits sketchs qu'il y a autour dans le clip, qui sont un peu décalés par rapport à ça.
Alors il y a un titre autour des violences faites aux femmes. C'est un peu étonnant d'avoir un style un peu pop punk et burlesque et d'aborder des sujets sérieux. Autant on a " Cliquer comme un con " où là, ça dénonce le côté burlesque, peut être un bon moyen d'aborder ces sujets. Comment avez-vous abordé les choses par rapport à la composition, aux textes et la volonté d'aborder ce sujet-là ?
Thibault : Je vous laisse gérer car je n'étais pas là le jour où vous avez composé.
Éric : Effectivement, tu as bien résumé... LES 3 FROMAGES sont là pour faire passer un message fort en humour, mais on ne va pas y aller à fond. Dans ce morceau, on a essayé d'esquiver un peu le sujet, mais à la fin, à la chute, tu vas comprendre et tu l'as compris. Tant mieux. C'est cool, c’est que le message passe.
Willy : Il y a plusieurs possibilités de compréhension sur les titres. Et c'est vrai que le fond de cette chanson, c'est pour faire un doigt à tous ceux qui frappent les femmes et pour promouvoir la lutte contre les violences sexistes et sexuelles.
Kevin : Dans mon souvenir, ça s'est construit, à la base, ce n'était pas spécialement pour les violences faites aux femmes mais sur les personnes toxiques, ça aurait pu être de n'importe quel côté hommes ou femmes. Mais sauf que là, je pense que qu’il y a une actualité par rapport à ça. Tant mieux qu’on en parle et que ce soient des choses qui soient dénoncées. Et du coup, ça nous a aiguillé pour nous dire d’écrire dans ce sens-là. Du coup, je pense que ça s'est construit aussi dans nos têtes par rapport à ce qu'on entendait à l'époque, et ça nous fait plaisir de s'inscrire aussi dans cette actu à travers la cohérence. C'est très cohérent. Je pense qu'avec ce qu'on fait, j'ai l'impression que c'est quand même drôle tellement c'est abusé.
Kevin : Comme la chanson " Bon voyage " qui parle d'écologie, " Latino latina " aussi, qui parle de danse et de cigarettes.
Et c'est sur ce titre là que vous avez été chercher la référence Kendji Girac ?
Éric : C'est lui qui est venu nous chercher. C'est vrai, je me suis réveillé en pleine nuit il est venu me parler avec sa guitare et me dit " Eric, il va falloir que tu fasses une chanson latino ". J’ai composé direct et on a gardé le titre.

Mis à part les dons du ciel comme pour ce titre, comment marche la compo ? Finalement, on voit qu'il y a des claviers un peu eighties. Parfois, vous allez chercher dans la variété, vous allez chercher " We are the world ". Est-ce que vous fixez des limites un peu dans les compos ?
Éric : Pas du tout.
Kevin : Si le prix de mes claviers, c'est la limite parce que si j’avais de meilleurs claviers, je ferai des trucs plus modernes que eighties. J'ai des trucs vieux. Souvent, on a un thème de chanson, on se dit qu'on aimerait bien faire une chanson des années 80 qui sont dans les 80 et donc du coup, on va essayer de prendre les codes de ces choses-là et puis l'amener à notre sauce et on ne se donne pas de limite, mais on ne part pas sur n'importe quoi en trois morceaux années 80.
Eric : On avait la base. On savait qu'on voulait un morceau des années 80 ou un morceau latino machin. Pour nous, musicalement, c'est hyper intéressant d'explorer différents styles surtout en concert où tu peux passer d'un morceau country à un truc très punk et très engagé musicalement. En tout cas, on trouve ça bien de naviguer d’un style à l’autre tout en essayant de faire quelque chose de cohérent plus globalement. Il ne faut pas que les gens se disent mais c'est quoi ce groupe complètement aliéné qui nous fait un truc à la Kendji Girac et tout d'un coup nous fait une chanson métal ? On essaye de faire en live quelque chose d’homogène,
Willy : De cohérent.

Les 3 Fromages

On parlait tout à l'heure de la pandémie. Le corollaire de cette liberté de composition, c'est aussi l'impossibilité de faire des concerts. Est-ce que ça vous manque ? Et vous avez envie de défendre l'album sur scène et avez-vous une visibilité sur les sur les prochaines dates ?
Éric : La visibilité, c'est la tournée (il nous montre les flyers), mais c'est difficile de savoir si les premières dates auront lieu.
Kevin : Bien sûr, on est vraiment en préparation de tournée.
Willy : Après ça, ça, nous sommes embêterait de devoir faire des concerts assis, parce que le spectacle n'est pas prévu pour. En tout cas, ça ferait chier les gens. Il y aura peut-être des concerts qui seront annulés.
Eric : Du coup, ça arrive en temps normal, sans pandémie. Et tout ça. Je pense qu'il est bon pour toutes les salles de concert, pour tous les festivals. Il y aurait plus de ventes, plus de prévente, moins de soucis, d'appréhension. Nous, on est un peu dans ce cas là parce qu'on est un groupe encore en développement. Et si les gens n'ont pas envie de venir, pas parce qu'ils ne veulent pas nous voir, mais parce qu'il y a le masque ou le pass vaccinal ou etc. Ça nous fait grave chier, mais on est obligé de s'adapter à ça parce que c'est notre métier. Et puis c'est notre passion et on a envie de faire des choses. On a envie de continuer à soutenir aussi tous les gens qui se bougent et qui ont continué à se bouger depuis la pandémie et qui ont la tête sous l'eau comme tout le monde. On est tous dans le même bateau et c'est à nous tous de serrer les coudes, que ce soit le public, le gars de la salle, l'organisateur, le groupe. Je pense que c'est comme ça qu'on arrivera à tous sortir un peu la tête de l'eau si tout le monde faisait un peu. Un effort, quoi. Mais en tout cas, là, on est plus vers une fin que vers un début. En croisant les doigts.
Kevin : C'est vrai qu'on est là aussi pour faire du face to face, tout ça avec vous, contre moi, l'opportunité de défendre les disques, puisque même nous, ça nous manque un peu.

Avec quel(s) artiste(s) aimeriez-vous jouer, dire ce que vous aimeriez embarquer en première partie ou une affiche de rêve sur laquelle vous seriez…
Éric : BLINK 182. En fait, je pense, ça serait vraiment du stress. Et oui, c'est ça. C'était des gros groupes comme BLINK ou comme la chanson où on serait hyper stressé. Je pense les croiser ou de moi.
Kevin : Perso, c'est ce qui me ferait rêver. Pour plus tard, c'est faire un Olympia avec le nom les 3 FROMAGES sur la façade.
Éric : Il n'y aurait pas assez de places, ça sera marqué LES 3 FROMAGES, s'il vous plaît. Je crois que je redoute les achats sur les lettres favorables, la culture. D'ici là, on aura peut-être changé de nom.
Thibault : on s'appellerait LES FATALS PICARDS.

Les 3 Fromages

Regina ou Calzone ouverte ?
Willy : VESUVIO !
Éric : Non, mais par contre, en réaliser, moi, mon kif, ça serait d'être un groupe...
Thibault : on est un groupe mec !
Éric : Ce serait de passer un peu l'étape du développement. Et donc d'être un groupe qui remplit facilement en tout cas, de belles salles comme l'Olympia, etc. Ca permettrait non seulement de se la péter, mais ça permettrait surtout, en fait, de pouvoir embarquer des gens avec nous. Donc, tu disais par exemple prendre ou choisir nos premières parties, tu ne le fais jamais parce qu'on laisse le choix aux organisateurs et on n'a pas les épaules pour le faire. Par exemple, on aimerait amener des groupes en développement avec nous, des groupes, des groupes d'amis qui ne ramènent pas forcément du public, mais qui méritent d'être sur le devant de la scène, etc. Donc moi, c'est plutôt le côté entraide et développement que je kifferais de faire à un niveau un peu plus élevé pour que tout soit plus facile.
Profitons-en, avez-vous un ou deux groupes à nous conseiller ?
Éric : Par exemple en première partie, il y a un groupe qui s'appelle SERIOUSLY SERIOUS, C'est un groupe Suisse. Et ils font un style GREEN DAY très rock, sixties, et ils sont super cool. On va jouer avec eux à Morteau le 29 avril. Et du coup, moi, j'aimerais bien les inviter et faire un échange avec eux. Ils nous invitent aussi en Suisse pour certains concerts. Il y a aussi les SHADY FAT CATS de Vannes, ils sont un peu punk. Et c’est ce qui fait que nous, on adore, mais c’est est invendable. Invendable ? J'exagère.
Willy : Qui n'est pas à la mode en France.
Eric : Mais si on les prend là actuellement, en première partie, c'est un peu se tirer une balle dans le pied car ça ne va pas ramener plus de gens, etc. En fait, c'est compliqué, tu ne peux pas jouer deux groupes en développement, ça va être assez compliqué. C'est pour ça que nous, on espère qu’avec cet album, on va grimper une marche pour pouvoir justement prendre ces groupes-là. Et là, on est obligé de prendre des groupes un peu costauds pour pour qu'il y ait 400 ou 500 personnes dans la salle où on va jouer. Donc, on parlait de SUGAR AND TIGER tout à l'heure, c'est un nom car il y a DIDIER WAMPAS dans le groupe. Ca collerait bien, car ce ne sont des inconnus. Mais on aimerait prendre des groupes peu connus de potes qui font de la bonne musique et monter des plateaux avec.

Merci à vous pour ces interviews.
Éric : Merci à toi.