Novembre


Interview réalisée par Virgile par mail au mois de Mai 2023.


Bonjour et merci pour l’interview.
Pouvez-vous vous présenter ainsi que le groupe ?

Le Pendu : Bonjour je suis Jérémie AKA Le Pendu et je compose pour NOVEMBRE.
L’Amiral : Salut à tous ! Ici Olivier Lacroix chanteur et parolier. Te présenter NOVEMBRE en faisant simple ? Je dirais de la chanson française aux accents polar noir/thrillers d’épouvante…
Il y a peu de temps quelqu’un a qualifié NOVEMBRE de " Slam Morbide ". J’aime beaucoup cette idée !

Comment a été décidé le nom du groupe ?
L’Amiral : On trouvait que ce nom illustré à merveille l’ambiance que nous souhaitions pour notre musique et c’est aussi la période à laquelle nous avons commencé à écrire. Nous vivions sur Limoges (surnommée ville brouillard) quand nous avons créé le groupe et là-bas dans le limousin, les mois de Novembre n’y sont pas vraiment funky (rires)… pluie, froid, ciel bas, tu hésites entre rester au coin de la cheminée ou aller tuer des gens ??
Plus sérieusement, l’idée d’un mois pour nommer le groupe est apparue assez naturellement. Cette période de l’année marque l’entrée dans l’hiver avec son lot de déprimes saisonnières, suicides, décompensations psychologiques en tous genres. Elle est la fin d’un cycle pour certains, le commencement pour d’autres. C’est un mois où le temps est en suspens. Bref, le nom parfait pour illustrer au mieux la couleur et les émotions de notre musique.

Comment s’est faite la signature chez Source Atone Records ?
L’Amiral : Krys (un des deux boss du label) est un très vieil ami à moi et un grand fan du projet depuis ses débuts. L’idée de faire un format " long " pour NOVEMBRE n’était pas prévu car on pensait sortir des titres au compte-goutte. Puis après réflexion (très rapide), nous avons intégré l’écurie de Source Atone Records avec cet album " Inox ". Faire partie de leur vitrine est un honneur pour nous car ils ont de vrais petits bijoux de groupes. La signature d’un projet tel que le nôtre est super couillue de leur part ! Nous avons un style tellement hybride et dur à " travailler ". A l’heure actuelle, plus personne ne se mouille trop sur des groupes un peu trop " atypiques ".

Novembre

Votre premier album " Inox " est sorti le 5 mai, comment sont les retours ?
Le Pendu : Touchons du bois, jusque-là nous n’avons eu que de bons retours. On a conscience que notre musique ne plaira pas à tout le monde. Soit les gens vont adorer, soit ils vont détester, il n’y aura pas d’entre deux.

Que pouvez-vous me dire sur le processus de création de l’album ?
Le Pendu : C’est triste mais on n’a pas grand-chose à dire lol. Le processus a été hyper classique comme beaucoup de groupes je pense. Pour ça on a pas été très originaux ;-)

Le clip de " Marchand de fables " est sorti il y a 2 ans. C’était un long chemin pour arriver à cette sortie ?
Le Pendu : C’est vrai que ça peut paraître long. L’Amiral et moi avons des plannings bien chargés entre travail, vie de famille etc. On a fait les choses un peu comme on avait envie de les faire, sans même réfléchir à sortir un album ou faire du titre par titre. Du coup, " Marchand de fables " est sorti avant même qu’on sache qu’on allait sortir un CD.

Comment est venu le concept de ce premier album ?
Le Pendu : Comme je le disais juste avant, on s’est pas fixé de lignes directrices lors de la compo. On est juste restés fidèles à ce qu’on avait envie de faire. À la base on pensait sortir les titres au fur et à mesure et on s’est vite retrouvés avec une dizaine de morceaux. C’est à ce moment on a changé notre fusil d’épaule en proposant ce long format. Le concept est simple, mettre en musique des histoires terrifiantes ;-)

Quelles sont vos inspirations ?
Le Pendu : La musique évidemment. Plus particulièrement les musiques sombres types metal ou post rock, du rap (LA RUMEUR, Casey, Benjamin Epps). Je suis un fondu de cinéma et pas forcément les films d’horreur.
Je suis aide-soignant à l’hôpital et c’est vrai que d’être face à des situations parfois terrifiantes, gores ou d’une tristesse sans nom peut largement m’inspirer.
L’Amiral : Pour la musique c’est très vaste, ça peut aller de CONVERGE, CULT OF LUNA à de la chanson française comme Bashung, Gainsbourg, Cabrel, en passant par du rap, flamenco, trip hop etc…. Je serai bien malheureux à n’écouter que du métal !
Pour ce qui est de l’écriture et de l’inspiration c’est un amalgame de beaucoup de choses. Il est évident que des films ou des bouquins ont inconsciemment aiguisé ma créativité. De vieux souvenirs ou terreurs d’enfance bien enfouis que j’aime aller déterrer et tenter de mettre en chanson. Je suis infirmier et, comme mon Pendu, évoluer dans ce milieu professionnel depuis tant d’années laisse des traces indélébiles. Je me nourris d’ambiances, d’atmosphères. Je gamberge sur pleins d’idées que je couche par écrit en les tournant à la sauce " bien darkos ". Tout peut partir d’un mot, d’une situation banale. Je bouillonne d’idées. La difficulté est de les accoucher sur papier et sublimer les pépites que crée mon Pendu.

Personnellement, j’ai l’impression que l’album et assez déroutant, dense et ne nous caresse jamais dans le sens du poil. Il nous malmène, nous agresse, l’atmosphère se refroidit à mesure qu’on l’écoute. J’ai le sentiment que son écoute se mérite. Comment s’est passée sa composition ? La musique et les paroles semblent étroitement liées…
Le Pendu : On a de la chance d’être un duo, la compo se fait assez vite. Je fais les musiques, L’Amiral les paroles. J’enregistre tout ce que je compose quitte à en envoyer trop à Olivier. Il écoute, voit ce qui l’inspire le plus et il écrit des paroles. On se connait très bien et du coup on est vraiment sur la même longueur d’onde. Je n’interviens jamais sur ce qu’Olivier écrit. Il fait mouche à chaque fois.
Une fois que les mises à plat sont faites, on va chez Fred du Conkrete Studio. C’est là qu’on enregistre et Fred passe sa couche de vernis.
L’Amiral : Pour NOVEMBRE, je n’attaque jamais un morceau sans une instru du Pendu. Ce sont ses ambiances qui me donnent l’impulsion et la motivation de m’y mettre !
Pour ce qui est de tes sensations (l’album te malmène, t’agresse etc…) et bien je me dis que le pari est réussi ?? !!! C’est précisément là où nous voulons amener l’auditeur.

Novembre

Parlez-moi de l’histoire derrière “ la Colline silencieuse ” ?
L’Amiral : Chaque titre de NOVEMBRE peut partir d’un rien. Là de mes souvenirs (ce texte n’est plus tout jeune), je suis parti sur ses immenses serres annexées aux très vieilles bâtisses. J’ai toujours trouvé magnifique et intrigant ces immenses verrières accolées à l’arrière de vieux manoirs… Du coup, l’imaginaire fait son bonhomme de chemin et donne naissance à des personnages tels que ce jardinier zarbi.

Parlez moi de “ Jack Knight ” et de son clip.
Ce titre est certainement mon préféré l’album. J’ai l’impression que la malle du clip que tire le personnage jusqu’à l’arbre symbolise quelque part le fardeau des mauvaises pensées et de la dépression, du quotidien…

L’Amiral : Tu peux mettre beaucoup de choses derrière ce morceau. Cette malle peut en effet représenter ce que tu dis. En fait, chacun peut se faire sa propre interprétation. A la base, je souhaitais écrire un titre sur le suicide et plus particulièrement la pendaison. Cette façon de se donner la mort m’a toujours fasciné depuis gosse. Trouver le matériel, le lieu, le moment, etc… Tout ce rituel bien établi avant le passage à l’acte m’a toujours fait cogiter. Je cherchais aussi un point commun entre nos deux personnages l’Amiral et le Pendu, et comme une évidence est apparu le Nœud (Les nœuds marins et le nœud coulant). " Jack Knight " est le nom d’un bourreau londonien ayant inventé cette boucle à la fin du XVII. Le titre est écrit en 2 parties bien distinctes. La première : une énumération de différents nœuds en tous genres. La deuxième : le choix du protagoniste se porte de celui qui sera " l’élu de son cœur, l’élu de son deuil " : le Nœud coulant.

“ Je, Tu ” me fait penser à Jeffrey Dahmer qui s’était entraîné sur des animaux avant de s’attaquer aux hommes. Qu’en pensez-vous ?
L’Amiral : Ahah oui c’est vrai ! Pour le coup, ce morceau a été écrit bien longtemps avant l’existence de cette série (quel acteur au passage !). Bon après, je crois que bon nombre de tueurs en séries ont fait leurs armes en mutilant des animaux.

C’est quoi être d’humeur " Inox ” ?
L’Amiral : Tu mets tout ce que tu veux derrière ça ! C’est là toute la magie de notre langue… Les mots parlent d’eux même ! Dans le morceau " Inox ", visiblement cela n’annonce rien de bon. J’aime notre langue pour toutes ces choses. L’infinité de tournures qui s’offre à nous, la puissance de la phonétique de certains mots. C’est une mine d’or. On peut tout faire, tout se permettre.

Comment s'est passé l’enregistrement ?
Le Pendu : Comme pour le reste, sans trop se prendre la tête. Dès qu’un morceau était prêt on allait l’enregistrer chez Fred du Conkrete Studio. Ce qui est fait n’est plus à faire ;-). Ça a été un régal à enregistrer. La sensation de voir le projet prendre forme, de pouvoir se rendre compte de ce qu’allait rendre le produit fini. NOVEMBRE pour Olivier et moi c’est un peu notre bébé, du coup c’était un gros kiffe à faire.

Quelles étaient vos attentes et vos envies au niveau du mix et mastering ?
Le Pendu : Pour le coup, Fred a parfaitement compris ce qu’on avait envie de laisser passer à travers notre musique. Il a su la sublimer, la rendre plus lourde en ajoutant du relief sur certains passages. C’est notre 3 ème homme. Il a quasiment eu carte blanche, sur les arrangements, le mix et parfois même sur les structures. Olivier et moi voulions juste que ça soit limpide. Bien entendre et comprendre musique et paroles.

Novembre

La pochette de l’album me fait penser à un vieux poste radio autour duquel les familles se réunissaient pour écouter des serial audio. Que vouliez-vous raconter à travers la pochette ?
Le Pendu : Olivier et moi sommes assez " ritualisés " même si je sais que ce terme ne veut rien dire lol. On a besoin d’être dans une certaine humeur, de choisir le bon moment pour composer ou écrire. Du coup, à travers cette pochette, j’ai voulu monter ça. Le personnage à la main gantée se met un peu de musique pour se mettre dans l’ambiance afin de s’adonner à ses sombres activités. Il sait qu’il va passer un bon moment.

Quelles sont vos polars préférés tous supports ?
Le Pendu : Perso, je suis pas un gros lecteur. Ceux qui m’ont le plus marqués c’est Maud Mayeras, Maxime Chattam et Stephen King le patron.
Pour les films j’en ai une tripotée : Le Nom de la Rose, Shutter island, Usual suspect.
L’Amiral : Je ne vais pas être très original mais je crois que les vieux Hitchcock sont vraiment une grande source d’inspiration à la base. J’ai vu/lu beaucoup trop jeune certains films/nouvelles. Le Silence des agneaux est un film culte pour moi. Je trouve qu’il a ouvert la voie à un bon nombre de films du genre !

Avez-vous des dates de concert prévues ?
Le Pendu : Pour l’instant, on cale tout l’aspect scénique. Faut qu’on rebosse l’ambiance sur scène, les lumières, les décors. Nous avions énormément travaillé tout ça à l’époque du printemps de bourges mais nous devons remanier encore la formule pour ce nouvel album. Nous allons attaquer les dates vers Octobre, quelques-unes sont déjà calées.

Comment est l’accueil du public durant vos lives ?
Le Pendu : Généralement dans la fosse c’est plutôt calme lol. On a tout entendu. Ca fait écho à ce que je disais plus haut. Soit les gens adorent, soit ils détestent. La plupart du temps on nous dit que c’est dense, dans le sens où l’ambiance est hyper pesante et dérangeante. Personnellement ça me va d’entendre ça ;-)

Allez- vous mettre un écran en live pour renforcer cette ambiance malsaine ?
Le Pendu : On en n’a pas parlé avec Mon Amiral. A priori non… Pour avoir déjà pratiqué avec ERLEN MEYER je sais qu’effectivement ça rend vraiment bien sur scène mais c’est tellement de contraintes techniques… Du coup, on travaille plus sur le décorum sur scène, essayer de créer une ambiance type vieux grenier, des éclairages bien tamisés, quelque chose de très intimiste. On voudrait que le spectateur soit vraiment en totale immersion avec la musique. Par contre, et là je parle que pour moi, j’aimerais beaucoup faire faire un ciné concert. On a une musique qui s’y prête totalement.

La question que vous auriez aimé que je vous pose ?
Ça fait quoi de vouloir tuer des gens ?
Et la réponse ?
Un bien fou ;-)

Je vous laisse le mot de la fin pour les lecteurs.
Tamisez les lumières, servez-vous un bon whisky, installez-vous dans votre fauteuil le plus confortable et écoutez " INOX ". Vous allez en apprendre sur vous-même.