Mornifle


Interview réalisée par Djaycee par mail avec Florian (batterie) et Martin (guitare) au mois de Février 2021.


Salut, je commence toujours par une petite question en ce moment, malheureusement : comment allez dans le contexte actuel de confinement/reconfinement et couvre-feu ? Et surtout, est ce que vous pensez que la crise sanitaire a modifié votre façon de composer ?
Florian : Juste avant le confinement, on avait bouclé un studio, par contre, c'était début juillet et c'est tombé pile dans les restrictions. On s'est demandé un peu comment ça allait se passer. On a réussi à décaler un moment où il y avait juste des autorisations de déplacement, etc. Du coup, ça nous a laissé le temps pour composer un autre morceau que l'on a fait complètement à distance.
On enregistrait des riffs de guitares et on se les partageait. Moi, j'ai fait des batteries sur clavier. C'était un peu l'enfer parce que je n'ai pas de batterie à la maison. Mais oui, on s'en est sorti. Et on avait un vrai morceau pré produit avant d'entrer au studio.

Oui, c'est vrai qu'il y a eu pas mal d'expériences comme ça. Il y a eu les DROP DEAD CHAOS aussi, qui ne se sont jamais rencontrés, qui ont pu faire de petites choses sympathiques. On voit que finalement, ça change la façon de composer, même si, a priori, vous vous connaissez depuis longtemps.
Martin : Voilà donc, après sur chaque album on a une façon de composer différente. C'était une méthode totalement différente de composer dans le confinement. Il y a un des guitaristes sur trois qui est dans le Sud-Ouest, le bassiste à Nantes. Et puis après, on a été bloqués avec des restrictions, donc ça ramené à autre style de composition. Mais finalement, on s'y retrouve sans doute on n'est pas du tout lésés dans la composition.
Florian : On avait tous très envie de composer quelque chose, de mettre quelque chose à plat. Très envie de rebosser ensemble, surtout à distance ou pas. Finalement, on fait avec.

Pouvez-vous vous présenter pour ceux qui ne vous connaissent pas encore. Et puis peut-être parler aussi du changement de nom ; revenir finalement au premier titre que vous avez enregistré ensemble pour repartir d'une page blanche... D'où est venu ce besoin de repartir à zéro ?
Florian : Je pense que quand on s'était séparé il y a déjà cinq ans au final, on avait tous envie de voir autre chose. C'était une dissociation fondamentale du groupe. On avait juste envie de voir autre chose. Et puis, à l'inverse, quand on s'est reformé, on avait besoin de se dire que c'était plus vraiment GENERAL LEE même si c'étaient les mêmes personnes. Nous avions besoin d'un fresh start. Effectivement, on voulait partir sur du neuf, on voulait changer de nom, d’identité, etc. Mais quand même garder un clin d'œil à ces 15 ans passés avec GENERAL LEE. Donc, on s'est vite dit au final JUNON, ça correspondait bien à tout, une sorte de clin d'œil et le côté aux sources.
Martin : Avec le changement de nom, on ne considérait pas qu'on allait changer de musique. C'est juste une évolution. Je pense que si on n'avait pas splitté il y a 5 ans nous aurions pu sortir ces morceaux sous notre ancien nom.

Mais du coup, est-ce que vous ne vous tirez pas une balle dans le pied ? On vous connaît dans le milieu. Il y a les relations avec les labels, même si vous allez me dire que les hommes derrière le nom ne changent pas. Mais voilà, c'est quand même repartir à zéro en termes de promo. En termes d'acquis.
Martin : En fait, déjà, il y a le poids nom. C'est vrai qu’en France, il y a de cela 20 ans on ne mesurait vraiment le choix du nom de GENERAL LEE parce que pour nous, c'était le véhicule d'une série télé. Bon, après, forcément, on a eu plein de remarques. C'est t comme ça. De toute façon, on a forcément posé la question également à Elodie (de Singularités) qui nous accompagne. On s'était posé cette question-là il y a plus de cinq ans. On est juste là pour se faire plaisir parce qu'on est vraiment une bande de potes et on s'amuse à composer, à faire des concerts. Et donc voilà, je vais dire ceci, on ne va pas se brider en changeant de nom et que donc potentiellement, on aurait peut-être moins de visibilité, moins de concerts. On s'est dit qu'on allait se faire plaisir. On change de nom ce qu'on veut comme ça. On est mieux dans nos têtes. Pas forcément d'a priori concernant notre nom.
Florian : Ce sont effectivement des questions qu’on se posait déjà à l'époque, qu'on n'avait jamais fait. Le fait de repartir ensemble 5 ans plus tard, cela recolle avec cette volonté-là.

Junon

Comme Junon est la sœur de Jupiter et que Jupiter c’est Macron, Vous avez des plans sur le confinement. Vous savez comment ça va se passer ?
Martin : On sait qu'on va continuer de composer le confinement. Blague à part, on continue notre chemin…

Parlez-nous de vos influences. Pour ceux qui vous lisent et qui ne vous connaîtraient, pas encore, savoir à quoi s'attendre quand ils vont se le mettre entre les oreilles ?
Martin : De manière générale, on ne parle pas forcément de cet EP, mais on est tous influencés par la même chose, même si on est vachement différents. Il y a un des guitaristes qui est vachement plus hardcore. Moi, par exemple, je suis " plus gentil ". J'écoute vraiment de tout. Je pense que c'est ça qui fait la force de JUNON, qui a fait la force de GENERAL LEE. On n’est pas inscrit dans un style bien particulier. C'est vraiment le regroupement de toutes nos influences musicales.
Florian : On a essayé de mixer tout ce qu'on écoute, nous, tout ce qui peut être très différent. On a tous des vagues de hip hop, des vagues de hardcore après. L'essentiel, c'est d'avoir une espèce de noyau de groupe auquel on se retrouve tous. Est-ce que ça se retranscrit vraiment dans JUNON, je ne sais pas.
Par exemple, CONVERGE est vraiment quelque chose qui nous avait tous mis une tarte, un moment dans la vie. On remixe tout avec un tas d'influences. Les CULT OF LUNA, C'est fondamental dans ce qu'on a fait avec ce qu'on a fait avec GENRAL LEE cela le reste à mon avis dans Junon. Je me souviens qu'à l'époque de " Raiders of the evil eyes ", on avait cité le dernier album d'UNDEROATH à l'époque. J’écoute beaucoup de hardcore, de black, des trucs inécoutables. Et à la fin on presse et tu as Junon. C'était assez naturel, la façon dont on a composé. C'était très ouvert. Et puis, à la fin, j'ai l'impression que ces quatre morceaux représentent bien toutes nos influences remixées à notre sauce tout en gardant une cohérence.

C'est une renaissance. Vous parliez de composition pour l'album. Ces titres sont un peu plus pour démarcher, pour refaire connaître le Phoenix qui renaît de ses cendres. Mais est-ce que ce n'est pas un peu frustrant en 2021, de sortir un EP sans pouvoir le défendre en live. ?
Florian : Clairement, c'est ce qui me bouffe le plus. Cela étant, je pense qu'on avait tous nos raisons pour reformer le groupe. La raison première ? Là-dessus, je veux voir les copains sur scène, voyager et rencontrer tous ces gens. Peut-être même pas tant défendre l’EP parce que je suis convaincu qu'on a fait des trucs très cools et mine de rien on est dans une scène où les gens sont assez ouverts et très curieux. Et moi, ce qui me plait, c'est me promener, rencontrer tous ces gens qu'ils n'aiment ou pas ce que l'on fait comme musique et discuter. En fait, le but, c'est de discuter de musique.
Martin : Au final, On a toujours fait de la musique. Certains groupes font toujours le même type de musique. Nous nous sommes toujours fait plaisir avec GENERAL LEE notamment sur le dernier, qui était beaucoup plus hardcore, plus punk. On a perdu surement pas mal de monde sur ce disque, mais on s'est fait plaisir. Donc effectivement, c'est frustrant de ne pas partager ces nouveaux titres avec tout le monde. Cela étant, on a quand même une petite lueur d'espoir de faire un showcase. On était vachement enthousiaste à l'idée de pouvoir enfin rejouer devant des gens comme ça. Ça fait toujours plaisir d'avoir le retour des spectateurs sur les chances.
Et l'expérience du live stream, cela vous tenterait ou cela reste froid ?
Martin : On avait un peu évoqué, justement, quand on a pas pu faire le show on a évoqué le fait de faire un live stream. Mais bon, je pense que c'est quelque chose qui se prépare vraiment en amont. Et si on n'était pas assez armé, pour pouvoir sortir un live qui pourrait nous satisfaire.
Florian : Je ne sais pas si c'est quelque chose que toi tu regardes de façon générale, mais moi, perso, je n'ai pas regardé en live stream,
Non. J'ai plus tendance à mettre des vinyles sur la platine que d'aller voir des trucs complètement froids.
Florian : Après, il y a des expériences qui sont sympas par exemple le dernier ARCHITECTS. J'ai vu des extraits sans me taper le live intégral, mais il y avait une scénographie complètement folle. Cela avait l'air cool mais de la fosse. Regarder de la musique live tout seul ce n’est pas terrible.

Si on parle un peu de l'artwork de l’album. Il a été travaillé en amont avec la personne ou est-ce que cela vous a été livré brut comme ça ?
Martin : Je suis graphiste, donc j'ai été là dans le contexte covid pour servir l'artwork. Les précédents ont été réalisés par d'autres personnes, des graphistes qui ont l'habitude de faire des pochettes. Sur celui-ci on voulait faire bosser un photographe mais c'était assez compliqué avec le confinement c’était impossible de faire un shooting particulier. Ce genre de choses, c'était compliqué, donc on s'est finalement rabattu sur des photos qu'on aimait bien. Et du coup, ce que j'ai fait, c'est que j'ai retouché un peu les chromies. J'ai fait ma petite bidouille de mon côté, mais c'est ce qui pouvait refléter un peu l'idée de ce qu'on raconte derrière les chansons.

Junon

Si on aborde les textes, je reprends mes notes. A priori, vous avez été pas mal influencé par un bouquin. C'est ça ?
Florian : Sur " Carcosa " en particulier, le livre " The king in yellow " nous a pas mal inspiré. Le texte est presque littéralement des passages des extraits de ce livre. Il y a toute cette mythologie autour de ces rituels de ce lieu un peu damné. Qui est super intéressant en soi et qui nous parle, qui retranscrit bien aussi l'énergie et le côté dark et mélancolique qu’il y a dans les titres. Arnaud a fait un super job pour mettre des mots sur ce que nous, on compose en tant que musicien.
C'est la musique d'abord et les textes ensuite ?
Florian : Nous, on le voit comme cela du point de vue musicien. Arnaud écrit tout de son côté et après il adapte nous dans la façon dont on compose on est très focus sur la musique. Et Arnaud vient caler un truc qui colle à ça, c’est lui qui écrit tout d'un point de vue purement texte là-dessus. Ce sont des thèmes qu'on a de base en commun. On s'est intéressé au " King in yellow " via la série True Detective et toute la fin de la première saison. C’était quelque chose de complètement inconscient.
Martin : Après, c'est vrai que lors des compositions, Arnaud est toujours là. Et nous, on est tellement dans notre truc. On compose et donc on a notre truc en tête. Et c'est bien d'être challenger. Il aussi là pour avoir un œil extérieur, entre guillemets, au rythme, qu'ont nos compos qu'on pourrait avoir déjà établi dans les têtes. C'est bien parce qu'en fait, il casse le truc et lui aussi a une idée du morceau. Je pense qu'il nous drive aussi, inconsciemment, sur ce que lui pourrait percevoir en termes de texte sur son idée globale. Je pense que de toute façon, on compose vraiment tous ensemble, même si c'est fragmenté, on compose tous ensemble et chacun son truc à mettre.

Le lien est peut-être fait directement avec eux avec le clip. Comment s'est passé le tournage dans un lieu un peu spécifique ?
Florian : Du coup, on a eu la chance de faire juste après le Studio nous avons fait une résidence aux quatre écluses à Dunkerque. C'était un des moyens pour nous de pouvoir répéter et jouer ensemble. Mine de rien pour le staff des quatre écluses c'était cool de pouvoir bosser sur un truc. Et puis, complètement au détour de cet énorme bâtiment qui s'appelle le Frac, est un ancien chantier naval de Dunkerque qui est réhabilité en musée. On voit cet énorme bâtiment avec un belvédère au sommet. Et puis on gamberge et on se dit que c'est là qu'il faut qu’on tourne notre clip.
Martin : C'est vrai qu'on n'a pas beaucoup fait de vrai clip. Lors du dernier album, on en a fait un mais ça fait plaisir d'avoir un support comme ça, de qualité. Et qui plus est, en plus, le réalisateur, c'est un ami espagnol. On s'entend très bien. C'était vraiment super de bosser avec lui. JUNON, c'est vraiment une histoire de potes, c'est super agréable de bosser dans ces conditions.

Quelle est la question que je ne vous ai pas posée et à laquelle vous auriez voulu répondre. Et quelle est la réponse à celle-là ?
Martin : C'est surtout l'une des premières fois qu'on répond à des interviews comme ça.
Généralement, c'est plutôt Arnaud qui s'y colle. C'est vrai qu'on est plutôt pipelette, peut être pipelette aussi. On a brassé pas mal de choses.
Florian : Ah si la vrai question c'est de savoir si on est plus fricadelles ou Mexicanos ?
Et la réponse : Complètement Mexicanos, il y a des petits trucs en plus.

Et puis le mot de la fin pour nos lecteurs ?
Florian : Le live ! Martin : D'ici là, on aura peut-être un album...

Merci pour cet échange.