CLARA LUCIANI - Sainte-Victoire: Les découvertes récentes des chanteuses françaises pop taquinaient plus avec la variété qu’avec le rock. Ce point étant entendu, cela ne jouait en rien sur leur talent. Une explication résidait principalement sur leur instrument de prédilection bien qu’à cordes mais plutôt à touches noires et blanches ; le nombre de leurs cordes excédant souvent le nombre de six. Ce qui marque avec CLARA LUCIANI, outre le charisme évident, outrageusement naturel, présent sur toutes les photos de presse - charisme ambivalent donnant tant à sombrer dans son regard et son univers qu’à s’en éloigner pour ne pas se faire happer par quelque chose qui nous dépasse et nous transcende. Le rouge de la pochette va également dans ce sens ; sens interdit ou " redlight " roxanienne signifiant que les plaisirs musicaux nous attendent derrière les premières notes ? Cette ambivalence schizophrène est présente dès le premier titre " la Grenade ", " sous mon sein la Grenade " charme et sens interdit. L’invective " hé toi ! ", l’impératif " suis-moi ! " ne sont pas là pour nous permettre de conclure à savoir s’il faut se livrer ou non ; d’autant plus que par " Je ne suis qu’un animal déguisé en madone " ou " Prends garde " les mises en garde se font nombreuses. La chanteuse se fait guide dans la ville blafarde, elle nous promet de la rixe mais au conditionnel. " Sous mon sein la Grenade "... La basse nous entraine dans ses ruelles qui se révéleront au cours de l’album ne pas être des impasses. CLARA quitte ensuite " la plage " pour s’aventurer sur " la baie " que METRONOMY a élevé au rang de chanson de l’été, il y a quelques années, mais quasi méconnaissable francisée mais tout aussi ensoleillée. CLARA LUCIANI actualise la tradition des chanteurs français de reprendre des chansons d’outre-manche. Telle une MARIE LAFORET du 21e siècle, elle nous fait l’équivalent d’un " Marie douceur " mais en décalage intelligent de plus de 7 ans, soit plus de temps qu’il faut pour que ce " summer hit " soit partiellement effacé de nos mémoires. Elle se la réapproprie intégralement, obligeant l’auditeur à vérifier si l’homonymie de titre ne serait que fortuite... Sur la troisième piste " On ne meurt pas d’amour ", CLARA LUCIANI se transforme en " FRANÇOISE HARDY meets THE STROKES ", la guitare de la jeune femme épaulée par les claviers de Sage ou Yuksek. Sorte de mashup cérébré entre " The end has no end " et " Message personnel ", cette chanson révèle le talent de la jeune femme qu’il aurait été facile de considérer à tort comme une simple copiste talentueuse sur le titre précédent. La simple allitération sur le titre " Eddy ", " non ne dit rien, Eddy rien de plus " susurre sur des notes de cuivres et une basse millimétrée nous amènerait presque sur des territoires trip hop de MASSIVE ATTACK. Et pendant le temps de la chanson je troquerai bien mon prénom contre ce sobriquet, rien que pour être destinataire de ces paroles. " Les fleurs " et leur beauté muette ne peut que renvoyer à cette beauté froide que l’artiste dégage sur les photos de presse ou plutôt semble dégager, comme une barrière, une protection après les affres qu’elle a rencontrées. Et le saxophone, présent est là pour alléger les paroles. La chanson se distord et il est évident que la chanteuse va certainement perdre les aficionados d’une pop lisse et mielleuse et ce n’est que tant mieux. Reste à espérer que les lives permettent aux riffs de sortir de leur cage. " Comme toi " la dualité et l’altérité, la madone se fait humaine. L’autre ne comprenant pas les souffrances de la chanteuse. Les douleurs sont souvent génitrices de chansons parfaites et d’albums touchants et il est évident que la chanteuse a du énormément souffrir pour écrire des chansons de la cette trempe. Sur " drôle d’époque ", le timbre de la voix de CLARA se rapproche de celui FISHBACH et encore une fois, il est à espérer que le live pourra révéler le côté rock de la jeune femme. Il est question ici de féminité et de stéréotype. Mais également de la figure Christique, ce chemin de croix est en fait celui de " Sainte Victoire ". La chanteuse fait-elle partie de ces martyres ou sa résilience est-elle la " sainte victoire " ? L’oxymore " monstre d’amour " semble définir la chanteuse et la transition avec " Dernière fois " n’est pas anodine car la chanson nous emmène sur la rupture, tout en riffs et il est facile de s’imaginer sur un live, accélérant le tempo se fasse beaucoup plus rauque et rock. La chanson planante de rupture mais cette rupture se veut sadique, tant la femme veut que ses souvenirs hantent l’amoureux qui l’a éconduite comme une marque au fer rouge, un tatouage à vie. "Dors " se fait berceuse et le disque se termine sur le titre éponyme, parlé qui montre que la jeune femme a surmonté sa séparation et en ressort grandie : " Tu m'a permis de comprendre que j'étais invincible, victorieuse quel que soit l'issue. Je suis armée jusqu'aux dents. Sous mon sein… une grenade " comme une invitation à réécouter cet album à l’infini. (Chronique réalisée par Djaycee) Date de sortie: 6 Avril 2018 Label/Distributeur: Initial Artist Services Site Web: www.facebook.com/claralucianimusique |
![]() 1. La grenade 2. La baie 3. On ne meurt pas d'amour 4. Eddy 5. Les fleurs 6. Comme toi 7. Drôle d'époque 8. Monstre d'amour 9. La dernière fois 10. Dors |