BABYLON PRESSION - Heureux d'être Content:
" Je vous laisse bande de tocards, comme spectateurs vieillissants de votre médiocrité, à accomplir vos sordides petites tâches quotidiennes ! Je me lève à midi en espérant que vous soyez tous morts ! ".
Voilà le petit avant-propos ouvrant " Heureux d’Être Content " qui nous situe un BABYLON PRESSION édition 2017 à priori plus acide, plus caustique, satirique, critique et acerbe que jamais. Fêtant ses 20 ans d’activité et 6 ans après avoir sorti sa dernière production, le crew de sales gosses revient avec un quatrième album totalement financé par une horde de 142 généreux Ululeurs motivés par une présentation du projet à l’image du groupe : d’une drôlerie insolente et décalée.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la générosité des contributeurs est grassement récompensée. La pochette, déjà, aussi glauque que splendide, avec son clown dépravé en train de flamber du crâne, est une œuvre signée ELVISDEAD (www.elvisdead.com), le print shop plein de classieuses illustrations, géré par notre grand prince du micro, Mathieu Pequignot. Le visuel laisse un goût âpre, aussi déroutant que dégoûtant et peu rassurant. En somme… de quoi bien aguicher !
Composé de 10 cartouches, le chargeur du magnum “ Heureux D’Être Content ” expédie ses bastos en perforant le crâne à chaque détonation. Dès " J’Arrive Quand J’Arrive ", le ton est donné : BABYLON PRESSION n’a jamais été aussi vivant.
Si à l’époque, on pouvait parler d’un groupe revendicatif politiquement, avec une dimension " consciente ", même si souvent dans la raillerie satirique, la critique brûlante, ironique et bien salée, aujourd’hui, le groupe s’est intégralement affranchi d’un quelconque côté moralisateur pour intégralement s’axer sur son croustillant et délicieux mais immonde humour noir. Et pour l’heure, ce millième degré décapant est à base de lourdes thématiques sociales concernant des personnages tour-à-tour acteurs de leur déchéance, tour-à-tour passifs mais subissant de très sales crasses. Il va donc être question de cet employé qui déserte son poste merdique en envoyant chier son patron tout aussi merdique ; d’un clochard faisant chier le monde mais représentant le miroir alarmant d’une société de consommation où les fast-food sont une cible qui prend chère ; des conditions de vie déplorables des SDF ; d’un pitoyable père alcoolique qui entraine sa progéniture dans sa chute ; d’un alcoolique instable au sang particulièrement chaud ; d’un mec qui surprend sa nana dans une “ Boîte À Partouze ”, morceau qu’on pourrait croire être un clin d’œil au film “ Irréversible ” ; d’un maquereau amoureux de sa pute, ayant des difficultés à la partager avec ses clients ; d’un vieux en fin de course qui n’en a vraiment plus rien à faire de tout ; d’un papy pédophile qui craque pour sa petite-fille avec une petite dédicace à Jean-Luc Lahaye ; et enfin, d’un mec qui déteste les gamins (et plus particulièrement son gamin) et qui voudrait juste baiser sa femme sans avoir à penser à autre chose.
À travers tous ces morceaux, Mathieu multiplie les rôles, devient schyzophrène, interprète mille personnages verreux ou pommés et leurs opposants, comme s’il s’agissait d’un théâtre thrasho-acide et débridé avec lequel il est incroyablement à l’aise, changeant volontiers sa voix au gré des rôles, usant des gueulantes ou gerbant ses punchlines cyniques qui composent 100% de chacun de ses textes. Il se coupera la parole, crachera dans le micro, ajoutera une véritable plus value à ce qui pourrait n’être que du chant mais qui devient un jeu auquel il est impossible de ne pas adhérer. Si bien que jamais les textes en français ne gênent, au contraire ! Chaque pointe d’ironie salace est un délice qui tape dans le mille, un profond coup de schlass qui fait autant rire qu’il dérange et fait bouger les entrailles. Flirtant à chaque instant avec le malsain, son talent est tel qu’il lui permet pourtant de tout tourner en dérision avec une grande maitrise. Tous les thèmes graves comme les dégâts de l’alcool sur l’homme, la pédophilie, la découverte de femme utilisée comme un bout de viande, etc… pourrait être mal traité, soit trop borderline pour être drôle,  soit trop sérieux pour être “ léger ”, mais il n’en est rien, même si le Métal  acéré qui vient parfaire le remarquable travail du quatuor n’a rien de léger.
Parce que le rouleau compresseur n’a jamais été aussi massif : les rythmiques Punks à la batterie témoignent d’une justesse quasi robotique à chaque coup de baguette et d’une robustesse virile qui rendrait KAARIS fan des Dieux du Stade. Ajoutons-y le groove monstrueusement lourd de Roswell qui vient sublimer mélodiquement une tranchante guitare, celle-ci étant le véritable wagon de tête d’un Punk’N’Roll sauvagement Metalisé ! La fusion des genres qu’on pourrait résumer globalement à du Brutal Punk made in France est une réussite totale, rappelant les meilleurs airs punks avec “J’Arrive Quand J’Arrive ”, “ La Pinte ” ou “ La Loi De La Rue ”, s’imprègnant de temps à autre d’un Thrash’N’Roll décapant avec “ Je M’En Sortira ”, ou d’un Rock bluesy qui se rapproche des racines du genre avec “ Toutes Des Mères Sauf Ma Pute ”.
Et ça, c’est sans compter les deux pièces maîtresses du disque, les deux masterpieces qui sortent d’un lot pourtant déjà irréprochable : “ Verse Ta Javel ”, véritable single en puissance, complètement décomplexé avec son ouverture au bottleneck tellement Rock’N’Roll et ses chœurs féminins qui viennent compléter un hymne où chaque phrase a un inégalable potentiel  pour  s’incruster dans la tête. Grosse tuerie ! Et du même calibre, “ La Raclure ” est demandée à l’appel ! Cette lourde et lente clôture saupoudrée de pédale wahwah chuinte un putain de Rock’N’Roll bien torturé qui se la joue US, sa dernière partie étant une exquise saloperie traînante où le même killing-riff à nouveau superposé à du bottleneck, sera répété à en faire dégueuler les grattes, saturer les amplis, et achever de la plus sale manière un énormissime album déjà bien dégueulassé par un sens de la satire dont seul BABYLON PRESSION a le secret.
En véritables mæstros du comico-dramatique et de la parodie sociale, les Marseillais font, à mes yeux, un sans faute bien au-dessus de leur brillante discographie que j’affectionne déjà particulièrement. Loin de moi l’envie de lécher le cul d’une rondelle aussi sale, mais l’un des derniers véritables bastions Punk s’est réveillé plus grand que jamais, plus abrasif que du papier de verre frotté à même la rétine, plus noir et décalé que Michæl Jackson. Mais assumé à 100%, tout le contenu de “ Heureux d’Être Content ” n’est pas à mettre entre toutes les oreilles, les lyrics pourtant bourrés d’humour noir frappant le tympan avec un cynisme violent mais toujours marrants font finalement pas mal réfléchir et peuvent destabiliser. L’objectif est donc parfaitement rempli puisque BABYLON PRESSION dérange toujours plus mais avec le sourire, mettant à sac le quotidien insipide, la misère, le mauvais goût et la triste réalité de ceux qui sont mauvais ou font de mauvais choix. Faire réfléchir et susciter des questionnements vis-à-vis de ce qu’on peut vivre dans notre vie quotidienne sans trop y faire gaffe tout en surdosant d’humour salace un sublime Brutal Punk, voilà ce que propose BABYLON PRESSION cette fois encore. Et le pire, c’est que les mecs en cravatte n’avaient jamais fait ça aussi bien !
On est pourtant qu’en début d’année, mais c’est bien partie pour être la rondelle la plus squattée par mes enceintes et, sans aucun doute, l’un des disques de l’année.

(Chronique réalisée par Ben)


Date de sortie: 21 Avril 2017
Label/Distributeur: Deadlight Entertainment
Site Web: www.babylon-pression.com
Babylon Pression

1. J’Arrive Quand J’Arrive
2. Verse Ta Javel
3. La Pinte
4. La Loi De La Rue
5. Je M’En Sortira
6. La Boîte À Partouze
7. Toutes Des Mères Sauf Ma Pute
8. Couche Confiance
9. Pépé Violeur
10. La Raclure