Arno Futur


Interview réalisée par Hicks le 25 janvier 2020 à Viry-Chatillon.


Bonjour, peux-tu te présenter ainsi que ton projet solo ?
Arno : Alors je me présente, je m'appelle Arno Futur, j'aimerai bien réussir ma vie mais c'est raté. En même temps, quand on s'appelle Arno Futur, faut pas espérer grand chose donc voilà. Je fais du Punk Rock, avant j'étais le chanteur des SALES MAJESTES et depuis, j'ai sorti un album solo. J'essaie de prêcher la bonne parole s'il y en a une en France, en Province, à Paris, dans les départements, partout où je peux...

Tu as sorti un album en 2007 sous le nom Juge Fulton " Universal Douleur " qui est ton premier album solo. Tu devais sortir un second album " Cannibal " en 2015 toujours sous le même nom Juge Fulton. Pourquoi avoir choisi finalement de le sortir sous ton propre nom Arno Futur ?
Arno : Juge Fulton c'est un projet que j'ai fait avec Christophe Crénel, qui était un projet commun et si après le second, je l'ai sorti sous nom Arno Futur, c'est parce que je trouvais que l'album me ressemblait encore plus donc c'est pour ça. Il y a des chansons différentes comme la ballade au piano que j'ai écrit avec ma fille, c'était plus proche de ce que j'avais envie de faire.

Comment a été composé cet album " Cannibal " ?
Arno : En me dévorant de partout, je l'ai composé à partir de mon petit logiciel Garage Band d'où le morceau " Garage Band " justement et puis après je l'ai composé avec d'autres personnes parce cet album je ne l'ai pas fait tout seul. Je l'ai fait avec Jean-Pierre de REVIENS FERNANDE, avec Christophe Crénel qui m'a donné un coup de main à la réalisation et avec d'autres musiciens comme Benjamin qui sont venus faire des parties de batterie. C'est un projet fait avec plein de personnes, même si c'est un album solo, de toute façon, pour moi, un album solo n'est jamais vraiment un truc fait tout seul, tu le fais avec d'autres personnes, des échanges, c'est un partage.

Sur ton album du Juge Fulton il y avait moins de personnes impliquées ?
Arno : Oui on était moins nombreux au niveau de l'écriture c'était moi tout seul. Pour " Cannibal ", tu as Jean-Pierre qui a participé à l'écriture. Après je dirais que l'album du Juge Fulton et " Cannibal ", c'est la suite logique quelque part, une évolution un peu différente mais avec pas mal de similitudes.
C'est pour ça aussi qu'en live, je joue des morceaux comme " Monopoly " ou " Je Vous Aime " qui sont sur l'album du Juge Fulton.


Peux-tu me parler du titre " Inutile " ?
Arno : Ce titre c'est le guitariste Thierry Saul, qui joue avec moi en live, qui l'a écrit, comme quoi tu vois " Cannibal " n'est pas que mon album solo. Donc ce titre là a été écrit et enregistré il y a 2 ans, je l'aime bien et je voulais vraiment le mettre sur ce nouvel album, le texte est assez différent de ce que j'ai l'habitude d'écrire en plus...

Le titre " Junk Food " c'est à la fois une critique des médias et de la nourriture ?
Arno : Oui c'est un peu ça, c'est ce qu' on essaie de nous vendre aussi de manière générale. " Cannibal " parle de tout cela, de tout ce qui nous dévore, de cette société de consommation, de toute cette mal bouffe. On ne se rend pas bien compte mais on est tous conditionnés, on nous a créé des besoins. Mais " Cannibal " parle aussi de politique, de Big Brother, de la manière dont on nous observe...

Concernant " Garage Band ", à un moment tu dis " Quand le Garage Band nous a laissé tomber moi et mon clavier ", tu fais référence à qui, à quoi ?
Arno : Je travaille beaucoup sur Garage Band et des fois le logiciel tombe en panne. Je parle donc de ça, c'est l'histoire d'un mec qui écrit des morceaux le soir, qui se crée un monde à lui, ça parle aussi de solitude puisque ce gars là est tout seul avec son logiciel Garage Band et le jour où il tombe en panne, le gars se retrouve tout seul. C'est comme avec nos téléphones, on est tout le temps avec, moi y compris, on est seul avec nos machines...
Oui tu vois souvent des personnes face à face qui vont vissés sur leur téléphone et qui ne se parlent même pas...
Arno : C'est ça, il ne se parlent plus, ils ne communiquent plus entre eux, on va arriver à une situation où l'on osera même plus appelé sa petite amie, on ne lui parlera plus que virtuellement...


Comment en es-tu arrivé à faire une version de " Serial Killer " avec ta fille ?
Arno : En fait, un soir je suis rentré chez moi bourré, on est quand même des êtres humains, et j'ai commencé à écrire le morceau au piano. Le lendemain matin, je me suis mis à le jouer et ma fille est venue pousser la chansonnette sur le refrain, je lui ai dis qu'on allait l'enregistrer car je trouvais ça chouette de partager ce moment là. C'est le plus beau moment de l'album pour moi, d'être aller en studio avec elle, de la voir enregistrer et de partager ça avec son père, en plus tout s'est fait naturellement sans aucun calcul...
Oui ça se ressent sur le clip tout ça...
Arno : De toute façon, les enfants ne savent pas calculer, un enfant c'est sincère, ça fait les choses quand ça a envie...

Tu as des nouvelles compositions à venir ?
Arno : J'y travaille. Evidemment ça prend un peu de temps, faut trouver le temps entre les concerts, les répètes mais je commence à bosser sur de nouveaux titres et puis j'ai envie de continuer à travailler avec pleins d'autres gens différents, j'ai envie de partager plein d'autres choses déjà avec mes musiciens mais aussi avec d'autres personnes que j'aime bien, j'ai envie de les inviter à venir chanter avec moi, j'ai envie qu'ils viennent jouer de la guitare, de la basse... Pour l'instant j'ai 5-6 nouveaux titres encore à l'état brut...

Sur " Monopoly ", tu parlais de l'Etat ?
Arno : " Monopoly ", c'était une critique du système, une sorte de jeu de société entre les riches et les pauvres, j'y parle des hommes politiques qui nous gouvernent, qui nous donnent des leçons de morale sur tout mais qui ne se les appliquent même pas à eux.
Ça me fait penser à la polémique qu'il y a eu avec cet éboueur parisien qui s'était fait renvoyer parce qu'il s'était endormi durant sa pause, alors que certains parlementaires dorment à l'Assemblée...
Arno : Mais bien sûr c'est là où il y a un décalage de la part de ces gens là. Ils sont complètement déconnecté de la réalité. Ils te demandent sans cesse de te serrer la ceinture, de faire des efforts alors qu'eux ils se mettent à l'abri grâce à nos efforts...

Tu as travaillé avec LES HURLEMENTS D'LEO, tu peux m'en parler un peu ?
Arno : Ça était un joli projet. Ils m'ont appelé pour venir chanteur sur un album hommage à MANO SOLO. J'adore ces gars là donc j'y suis allé sans hésiter et je suis parti chanter pour une dizaine de dates. Ensuite, ils m'ont demandé de venir chanter sur un titre de leur album " Télégramme " et ensuite sur leur nouvel album, sorti il y a 2 ans. Bref, j'adore bosser avec eux...

C'est quoi tes influences ?
Arno : J'aime bien des groupes comme LES CADAVRES, LES SHÉRIF, toute cette scène alternative punk, LES BERUS évidemment, les groupes anglais comme LES CLASH, les SEX PISTOLS. J'aime beaucoup aussi des artistes comme BREL, FERRET, THIEFAINE, j'adore leurs textes...

Tu as eu l'occasion de faire des duo avec VEROLE...
Arno : On avait fait un duo sur l'album du Juge Fulton. Ca était aussi un super moment. C'est comme avec Didier Wampas qui est venu chanter sur " Jacques ". Jaime bien ces moments de partage et d'échange avec ces artistes qui amènent leur touche...
J'ai aussi le souvenir de " Va y José " et " La Rage " en live pour LES SALES MAJESTES...
Arno : Oui où Vérole venait chanter. C'est comme avec France de Griessen venue chanter " Petit Papa noël " avec nous sur scène. On a toujours essayer de partager ça avec d'autres musiciens...


Quelle est ta vision de la France actuelle ?
Arno : On est dans la merde. On est dans une société qui crée de plus en plus d'exclus, où l'individu prime. Les gens qui nous gouvernent sont complètement à la ramasse, ils sont malhonnêtes. Je ne sais pas où tout ça va aboutir mais en tout les cas, je soutiendrais toujours les gens qui refusent tout cela, qui refusent de s'appauvrir, je trouve ça scandaleux de voir tous ces hommes politiques te faire la morale et demander aux pauvres de faire encore plus d'efforts, c'est à eux de faire des efforts, de mettre la main à la poche, ce n'est pas à nous de le faire, je ne comprends pas ce nivellement par le bas, tout comme cette mascarade autour des retraites, on demande aux gens de travailler plus, mais eux que font-ils pour nous ? C'est la plus grande fumisterie qui soit. J'essaie d'être optimiste mais ça devient compliqué quand tu vois tout ce qui se passe autour de nous, en tout cas, je trouve ça bien et important que les gens occupent les rues et tous ses rassemblements de mécontents.
Y'a des textes des SALES MAJESTES qui ont 20-30 ans et qui sont toujours d'actualité...
Arno : Ouais et c'est malheureux, ça veut dire que le système n'a pas évolué, je trouve même qu'il régresse, mais bon, il faut continuer à se battre et essayer de rester positif.

Tu penses quoi de ton apparition dans le clip " Punk à Gogo " des SALES MAESTES avec ses images d'archives extrait du clip " Camarades " ?
Arno : Je n'étais pas au courant, je l'ai découvert...
Tu n'as pas été prévenu ?
Arno : Non
Si jamais ils te propose de remonter sur scène pour un duo, tu y vas ?
Arno : Non, j'ai définitivement tourné la page des SALES MAJESTES. Ils ont pris une autre direction, moi j'ai pris la mienne, on n'a plus les mêmes envies... Ca a été une grosse partie de ma vie, mais maintenant j'en écris une nouvelle...

Ce sont quoi tes projets pour 2020 ? Un nouvel album ?
Arno : Mes projets c'est de sortir les nouveaux titres que je suis en train d'écrire et de faire des concerts, de jouer partout où je pourrais car j'adore ça...

Je sens beaucoup d'ironie dans ton écriture et c'est ce qui me plait...
Arno : Oui en tout cas c'est ma façon de voir les choses et puis je trouve qu'avec l'humour et l'ironie t'arrives à faire passer plus de messages et puis c'est comme ça que ça me vient quand j'écris...
Tu n'as jamais eu envie de faire des recueils ?
Arno : Je ne sais pas si j'aurai le talent pour, mais en tout cas, j'ai bien écrire des textes avec de la musique, en fait je n'arrive pas à faire l'un ou l'autre, j'ai besoin des 2.

Quelle est la question que j'aurais du te poser ?
Arno : J'aime bien cette question car on me l'a jamais faite. En tout cas, je ne suis pas comme tous ces hommes politiques qui donnent les questions à l'avance...

Je te laisse le mot de la fin...
Arno : Ce soir, on joue à la Mjc St Exupéry, je suis très content d'y jouer. Il y a aussi WASHINGTON DEAD CATS, les BRIGITTES POP et les POURQUOI PAS ? Donc je pense qu'on va passer une bonne soirée. Sinon, on continue le combat, ne lâchez rien !
Et je voulais finir avec le mot partage, un mot qu'on entend jamais dans la bouche des hommes politiques, un mot qu'ils ne connaissent pas et c'est pour ça d'ailleurs qu'on est bien dans la merde comme même...

Photos réalisée par Laurent Besson - Caribou Photo.