Interview réalisée par Virgile par mail au mois de Juin 2020 avec Evan (guitare/chant), Joe (guitare lead), Dan (basse, synthé, orchestrations), Wayne (orchestrations) et Joe (batterie).
Bonjour et merci pour l’interview. Peux-tu présenter le groupe et me faire un petit historique ?
Evan : Bonjour. Le line-up actuel de WILDERUN a été créé au début de l'année 2012 après quelques années passées à faire des démos tout seul et à jouer avec certains membres du premier line-up. Nous avons vraiment commencé en tant que groupe de folk métal à ce moment là. Notre premier album " Olden Tales & Deathly Trails " était en fait une tentative de donner une tournure américaine au genre folk métal. Par la suite, nous avons commencé à aller sur un style plus atmosphérique et orchestral avec notre album de 2015 " Sleep at the Edge of the Earth ".
Vous êtes toujours en confinement ? J’ai vu que vous aviez fait une vidéo confinée pour le titre " Hope & Shadow ".
Joe : Nous sommes tous encore confinés à un certain niveau. En ce moment, certaines entreprises ont commencé à rouvrir, mais beaucoup attendent encore de connaître une date d'ouverture éventuelle.
Dan : Les choses semblent se rouvrir lentement aux États-Unis, mais alors que nous étions en plein confinement, nous avions décidé de faire quelque chose pour les fans afin d'aider à atténuer le choc d'avoir dû reporter notre tournée avec AETERNAM en Avril dernier. Malheureusement, nous n'avions pas trop d'options car nous vivons dans différents états et nous ne pouvions donc pas nous réunir en direct pour un concert. Nous avons donc décidé de réarranger notre chanson " Hope and Shadow " et de la filmer. C'était une façon amusante de passer le temps pendant la quarantaine et je suis très heureux de la façon dont cela s'est passé.
Vous avez sorti votre troisième album " Veil of Imagination " le 1er novembre 2019, 100% autoproduit et vous avez vendu des versions physiques qui ont rapidement été sold out. Pouvez-vous m'en dire plus sur cette belle histoire et aussi sur votre signature chez Century Media pour la re-sortie de l’album le 17 juillet 2020 ?
Evan : C'est certainement notre sortie la plus réussie jusqu'à présent. Pour la première fois, nous avons engagé une société appelée Adrenaline PR, ce qui, je pense, a vraiment contribué à booster la sortie. Ce fut deux mois assez stressants, car nous devions vendre le produit nous-mêmes, mais cela en valait la peine. Nous avions essayé de contacter les labels avant la sortie sans succès, mais il semble que la bonne presse que nous avons reçue après la sortie a suffisamment fait connaître notre nom pour que les labels y prêtent enfin attention. Quelques mois plus tard, Century Media a pris contact avec nous, nous avons conclu un accord, et nous voilà ! Nous sommes ravis de travailler avec eux, et tout aussi ravis d'avoir enfin de nouveaux CD et vinyles à vendre à nos fans patients.
Qu'attendez-vous de cette signature avec Century Media ? Peut-être la possibilité de faire plus de concerts en Europe (en France j'espère) et dans le monde ?
Dan : Récemment, nous avons commencé à travailler avec Stefan de Rock the Nation Touring et il a réussi à nous obtenir une place pour la prochaine tournée de SOILWORK l'année prochaine. Je suis donc très heureux de pouvoir enfin rayer de ma liste des choses à faire les concerts en Europe ! Avoir le soutien d'un label comme Century Media, nous ouvre certainement beaucoup de portes que nous aurions beaucoup de mal à ouvrir par nous-mêmes, donc je suis reconnaissant d'avoir le soutien financier et commercial de tout le monde au sein du label.
Quelle était votre motivation et votre mood pour la création de cet album ? Je pense que vous vouliez vous lancer un défi et faire un grand pas entre votre précédent album et cet album que je vois plus comme la B.O. d'un film, d'un voyage audio...
Joe : Merci beaucoup pour ces aimables paroles ! Avec cet album, nous avons essayé beaucoup de choses. Nous voulions explorer beaucoup de domaines musicaux et d'ambiances différentes. Nous avons aimé l'idée d'explorer et de trouver un terrain d'entente entre un passage musical épique et un passage musical calme et serein. Nous voulions vraiment voir ce que nous pouvions faire au milieu de tout ça. Bien sûr, les deux extrêmes sont également représentés sur le disque.
Personnellement, j’ai décollé dès le début avec " The Unimaginable Zero Summer " et je n'ai atterri qu'à la fin avec " When the Fire and the Rose Were One ", c'était une expérience époustouflante.
Evan : Merci ! Nous faisons de notre mieux pour que les albums soient une expérience d'écoute cohérente du début à la fin, je suis donc heureux d'entendre que l'album s'écoute si bien pour un si grand nombre de nos auditeurs. Créer un sentiment narratif singulier est vraiment important pour nous.
Pouvez-vous m'en dire plus sur le concept et le processus de création de cet album ?
Evan : C'est le fruit de quelques années de travail. La plupart des chansons ont été écrites en 2016-2017, bien que certaines parties aient été choisies au hasard à partir d'idées encore plus anciennes. J'écris des mélodies et des riffs un peu tout le temps, nos chansons peuvent être composées d’idées créées il y a des années. Une fois les chansons terminées, Wayne, Dan et moi-même avons commencé à avoir des réunions sur l'orchestration, ce qui a pris au total environ 9 mois. Il y a eu de nombreuses modifications et révisions, et beaucoup de prises de notes. L'album a été enregistré aux More Sound Studios en février et mars 2018.
Certains d'entre vous travaillent dans l'industrie télévisuelle et cinématographique en tant que compositeur comme Wayne J’ai pu ressentir ça avec votre approche cinématographique dans la musique du groupe.
Dan : Wayne et moi avons tous deux étudié et travaillé professionnellement dans l'industrie du cinéma, de la télévision et des jeux vidéo, et cela a sans aucun doute contribué énormément à notre processus d'écriture. Trouver un moyen d'organiser, de collaborer et de diffuser efficacement les idées et les dossiers est une chose que nous travaillons tous les deux sans relâche. Mais ce que j'apprécie le plus dans le fait de ne pas être le seul orchestrateur du groupe, c'est d'avoir la capacité de mélanger nos propres styles et d'arriver à quelque chose qu'aucun de nous n'aurait pu faire seul.
Wayne : Dan et moi sommes très influencés par la musique orchestrale lorsque nous travaillons ensemble sur les compositions symphoniques de WILDERUN. Et notre travail dans le domaine du film, de la télévision et des jeux vidéo nous a donné une foule de ressources, de compétences et de nouvelles techniques pour continuer à améliorer notre façon d'écrire pour WILDERUN. De plus, il est extrêmement bénéfique de travailler en équipe et de faire rebondir les idées les uns sur les autres, parce que nous arrivons toujours à des choses qu'aucun de nous n'aurait fait seul. Personnellement, j'aime la musique orchestrale et les musiques de film depuis que je suis enfant, et je suis très reconnaissant d'avoir pu travailler sur des films et des émissions de télévision de manière professionnelle depuis environ huit ans. Les musiques de film que j'aime influencent mon écriture pour n'importe quel projet, mais ce qui est vraiment amusant dans l'écriture de la musique symphonique pour WILDERUN, c'est que je peux vraiment embrasser le côté classique et pompeux des musiques de film que j'ai aimé en grandissant, comme celles de John Williams et d'Alan Silvestri. C'est différent de la plupart des musiques de film et de télévision modernes d'aujourd'hui. Il y a aussi les musiques de jeux vidéo comme celles sur lesquelles Dan a travaillé. Cela dépend totalement du projet, mais le plus souvent, le côté orchestral est utilisé comme une texture parmi des couches de grosses percussions, de synthés et d'autres éléments électroniques. L'orchestre joue bien sûr un rôle important, mais il n'est pas toujours la vedette du spectacle comme il l'était il y a 20 ou 30 ans. A moins qu'il ne s'agisse de musique pour un film de Marvel ou pour Star Wars.
Quelle est votre recette pour la composition des chansons de cet album ?
Evan : Le son de WILDERUN (du moins jusqu'à présent) est en fait une combinaison de mon écriture, des orchestrations de Wayne et Dan, et de l'apport instrumental de chacun. J'ai toujours commencé le processus en apportant au groupe les chansons principales, généralement sous forme de démo brute, et chacun contribue à ajouter de la couleur et de la texture. Lorsque j'écris les chansons, je ne pense généralement pas trop aux différents instruments. J'essaie juste de m'assurer que les mélodies, les harmonies et les rythmes fonctionnent bien ensemble. J'ai peut-être des idées très vagues sur les instruments qui pourraient jouer telle ou telle mélodie.
D'où vous sont venues toutes ses idées ? Ingram a fait un travail formidable.
Dan : Wayne, Evan et moi-même passons beaucoup de temps sur ce sujet avant même qu'une note d'orchestration ne soit écrite. Nous passons des heures à prendre des notes et à horodater chaque idée que nous avons pour les orchestrations et ce n'est qu'une fois que nous l'avons fait que nous commençons à proposer des pièces. Là encore, la capacité à faire rebondir les idées de chacun d'entre nous est ce qui rend cette partie du processus si spéciale pour nous.
Quand écrivez-vous et ajoutez-vous les paroles, l'idée du concept et du thème est-elle décidée avant ?
Evan : J'ai toujours écris la musique avant d'écrire les paroles. Pour être honnête, l'écriture des paroles c’est quelque chose que j'ai dû apprendre par nécessité, juste à force d'être le chanteur du groupe, ahah. C'était un peu plus facile sur notre premier disque quand nous utilisions de vieilles paroles folkloriques traditionnelles. Mais avec le temps, je suis devenu beaucoup plus à l'aise. Je pense qu'une grande partie de l'écriture des paroles est liée à l'acquisition d'une confiance suffisante pour écrire quelque chose de personnel, et d'une manière qui soit vraiment honnête avec soi-même. Au début, il s'agissait plutôt d'écrire des choses qui semblent cool en surface.
J'aime beaucoup la progression du premier titre " The Unimaginable Zero Summer ". J'ai vraiment l'impression de me promener dans la nature et de faire face à des vicissitudes épiques.
Evan : Merci ! Nous sommes très heureux de la façon dont ce morceau a tourné, surtout en ce qui concerne la façon dont il maintient la tension pendant une période très longue. Je ne suis pas sûr que nous y soyons parvenus avec d'autres chansons, au moins à ce niveau.
J'ai vu dans The Vlog que vous avez enregistré toute la section rythmique en live. Comment c’était de faire de cette manière et comment avez-vous enregistré le reste des instruments traditionnels et folkloriques ?
Dan : Nous avons eu cette idée au départ pour gagner du temps et de l'argent en studio. Au lieu d’enregistrer séparément, nous avons pu faire deux passages par chanson en un tiers du temps. Le hic, c'est que nous devions être plus préparés que jamais en tant que groupe pour que cela en vaille la peine. Heureusement, je joue avec les musiciens les plus talentueux avec lesquels j'ai jamais travaillé, donc ce n'était pas trop compliqué. Tout ce qui suit, la guitare rythmique, la basse et la batterie a été enregistré dans le style traditionnel d'enregistrement en tête-à-tête auquel nous sommes tous habitués.
Quelles étaient vos attentes concernant le mixage et le mastering ?
Evan : Nous savions que nous voulions que le mixage final ait un peu plus de punch que les deux précédents disques, au moins pour les parties lourdes. Il y a des riffs plus sombres sur ce disque, par rapport aux deux précédents, donc nous ne voulions pas que la puissance soit perdue. Mais, comme pour les disques précédents, nous voulions toujours nous assurer qu'il y avait beaucoup de dynamique et d'ampleur, surtout dans la façon dont l'orchestre se mélangeait avec le reste. Nous avons dressé une liste de quelques mixeurs à contacter, en fonction de ceux que nous pensions capables d'atteindre cet objectif.
Comment était-ce de travailler avec Dan Swanö pour le mix et Jens Bogren pour le mastering ? J'adore le mix il est vraiment chaud et organique...
Dan : C'était vraiment incroyable d'avoir la chance de travailler avec certains de nos producteurs préférés de la scène métal. Ils sont tous les deux passés maîtres dans leur art et sont vraiment des professionnels. Le processus n'aurait pas pu être plus facile.
Avez-vous une anecdote de studio ?
Jon : J'ai découvert environ une semaine après la séance de studio que j'avais un morceau de verre dans le pied. Au même endroit, je me souviens de mon pied qui de temps en temps me piquer de douleur en enregistrant la batterie. Donc " Veil of Imagination " a été enregistré avec du verre dans le pied. Un moment de plaisir !
Quelles ont été vos inspirations musicales pour cet album ?
Dan : Personnellement, je me suis beaucoup plus inspiré des artistes électroniques cette fois-ci pour les orchestrations. Bien que nous ayons surtout utilisé des échantillons orchestraux, c'est la première fois que nous les avons abordés plus comme une seule unité que comme un orchestre composé de 100 musiciens distincts. Nous avons pris plus de libertés en ajoutant des synthés, en manipulant l'audio et en superposant des échantillons dans les sons orchestraux pour modifier subtilement la saveur de l'album dans son ensemble. Ce fut une expérience vraiment libératrice.
Qui a fait la pochette de cet album et que voulais-tu dire avec cette pochette ? Pour moi, c'est comme une vie construite sur quelque chose de mort ?
Evan : Il s'appelle Adrian Cox (adriancoxart.com). Nous sommes fans de son travail depuis des années, et il est également fan de notre musique, donc c'était vraiment génial de pouvoir utiliser une de ses oeuvres. C'était déjà dessiné à l'avance, donc ce n'était pas une commande, mais nous avons senti qu'il correspondait si bien à l'ambiance de l'album que nous nous devions de l'utiliser. Une grande partie de cet album est consacré au sentiment d'être séparé de la réalité, et au lieu de cela, consumé par un nuage de pensées insignifiantes. La créature sur la pochette semble être aveuglée d'une certaine manière par la beauté qui l'entoure, se sentant morte et grise à l'intérieur. Nous avons eu l'impression que cela représentait assez bien l'album.
Pour vos concerts, prévoyez-vous un événement spécial avec un véritable orchestre au lieu de sampler les parties orchestrales ? Ce serait extraordinaire.
Jon : C'est un de mes fantasmes depuis notre création. Je m'évade souvent dans des images de moi faisant des blast beats à côté de la section des cuivres !
D'autres groupes l'ont fait. Dan a pu voir DIMMU BORGIR avec un orchestre en direct au Wacken. Si on arrive un jour à le faire, ce sera certainement un moment de " wow, on a réussi ? ".
Wayne : Ça fait partie d’une énorme liste de choses à faire avant de mourir ! Un jour, nous espérons en faire une réalité. Il y a sur tous nos albums des chansons qui ont vraiment exposé des sections orchestrales, et il a fallu une tonne d'efforts pour les faire sonner de façon réaliste avec des bibliothèques d'échantillons. Mais bien sûr, on ne peut jamais remplacer le vrai son.
Pouvoir entendre le début de " When The Fire And The Rose Were One " ou la fin de " Suncatcher " avec de vraies cordes, des cuivres et des bois me ferait probablement pleurer haha. J'ai travaillé sur quelques musiques de film où un véritable orchestre a été enregistré et j'ai pu entendre ma musique jouée par de vrais musiciens, et l'émotion qu'ils apportent à l'interprétation et au son est vraiment extraordinaire.
Comment était-ce de jouer pour 70.000 Tons of Metal ?
Jon : C'était vraiment un moment décisif pour notre carrière. Nous avions pris contact avec les canaux appropriés pour essayer d'obtenir des mois auparavant, mais nous n'avons jamais eu de nouvelles. Nous avions donc supposé que cela n'allait pas se produire. C'était un moment de folie d'ouvrir notre e-mail et de voir " 70000 tons of metal " dans le sujet quelques semaines avant la croisière. Etre sur le bateau est une expérience tellement géniale qu'elle n'a probablement pas sa place dans ce monde fou et horrible. Beaucoup de vos amis sont là. Tu partages la scène avec certains de tes groupes préférés. Cela ne semble pas réel. Aussi, essayer de jouer de la batterie sur un sol en mouvement est sacrément dur.
Vos fans pourront enfin acheter le vinyle, ferez-vous des éditions limitées, le CD sera-t-il différent de la version sortie en 2019 ?
Evan : Il y a quelques vinyles avec des couleurs spéciales, différentes pour les Etats-Unis et l'Europe - et oui, notre réédition du CD aura une cover spéciale de l'épique morceau d'IRON MAIDEN " Seventh Son of a Seventh Son " ! Nous avons cette cover dans notre poche depuis quelques années, nous sommes donc ravis de la sortir enfin.
Je vous laisse le mot de la fin. Si vous voulez dire quelque chose à vos fans français...
Dan : Merci à toi pour l'interview et j'ai hâte de voir tous nos fans français pour la première fois l'année prochaine !