EUROPA RIGOR MORTIS TOUR (part. 1) :
CARCASS + BRUJERIA + ROTTEN SOUND

Paris le 01/02/25
(Le Mondial du Tatouage - Grande Halle de la Viltette)




L'UNIVERS DU TATOUAGE AU SON DES MACHINES :
Difficile d'imaginer un cadre plus approprié qu'un festival de tatouage pour accueillir une soirée placée sous le signe du grind, du death et du metal extrême.
Dès l'entrée dans la Halle de la Villette, les machines à tatouer vrombissent, se mêlant aux conversations des visiteurs venus en nombre admirer les artistes à l'œuvre. Des centaines de tatoueurs, venus des quatre coins du monde, exposent leur talent, et la foule déambule entre les stands, contemplant les peaux fraîchement marquées d'encrage noir et coloré. Difficile de passer le week-end entier dans la grande Halle. Notre choix se porte donc sur la soirée du samedi, guidés par la programmation musicale qui correspond plus à notre ligne éditoriale que la veille. Avant d’assister au concours de la soirée, j’ai le temps de prendre mes marques dans la halle et de faire le tour des stands de tatoueurs et des différentes expositions.
Côté jury cette année (et presque comme les année précédentes), ce sont Mark Mahoney (Shamrock Social Club, Hollywood), Kari Barba (Outer Limits, Long Beach), Junko Shimada (Diamond Club Tattoo Parlor, San Francisco), Filip Leu (The Leu Family’s Family Iron, Lausanne) et Luke Atkinson (Checker Demon Tattoos, Stuttgart) qui ont eu l’honneur départager les meilleures pièces (petites, moyennes, large), les meilleurs torses et dos ou les tant attendus pour les tatoueurs, les " Best of Day " ou le dimanche le " Best of show ".
Parmi eux, Claudia Bindi (Italie - Pistoia), Angel Tattoo LC (France - Clermont-Ferrand) et Nat Jimenez (Ecosse - Edinburgh) se distinguent au concours "Best of Day" de ce samedi qui récompense les meilleurs tatouages réalisés durant la journée. Les styles varient : réalisme saisissant, néo-traditionnel flamboyant, blackwork minutieux… Le public assiste à la remise des prix avant que la Halle ne change d'atmosphère pour plonger dans la fureur du metal extrême.

Petit détour au Foodtrucks où je retrouve le plus musical des sandwichs chez Totin car les fondateurs de ce foodtrucks sont des anciens de la Nowhere.





ROTTEN SOUND - L'APOCALYPSE GRINDCORE (20h15) :
La formation finlandaise ROTTEN SOUND, forte de ses 30 ans d'activisme dans la scène grindcore, attaque son set avec une violence inouïe. La rapidité d'exécution des morceaux (certains sous la minute, à peine une poignée de secondes…), portée par une batterie survoltée et une voix gutturale d'une rare intensité, ne laisse aucun répit au public. Le pit explose instantanément, et les premiers pogo voient le jour.
C’est avec une brutalité fulgurante que ROTTEN SOUND ouvre les hostilités. Maîtres incontestés du grindcore finlandais, ils déversent leur fureur sur une fosse d’abord timide mais rapidement conquise par la puissance du combo. Pendant une grosse demi-heure, Keijo Niinimaa harangue la foule avec ses vocaux abrasifs, portés par une section rythmique infernale : Sami Latva enchaîne les blast beats et les d-beats sans relâche, tandis que la basse lourde et massive de Kristian Toivainen martèle chaque note. Mika Aalto, quant à lui, déploie ses riffs crust saturés au son inimitable, offrant à l’ensemble une patte death metal acérée.
Entre deux salves ultra-rapides, Keijo ponctue le set de discours engagés, rendant hommage à la résistance et à la liberté, tout en galvanisant le pit. Les épaules s’entrechoquent, la fosse se resserre et les premiers mouvements de foule se dessinent. Une mise en jambes intense qui laisse les spectateurs en sueur et prêts pour la suite. Dagular, un habitué de la fosse et pote de lycée, enchaîne pogos sans relâche. Une véritable tornade sonore, brutale et sans concession.

Set-list :
1. Self
2. Power
3. Pacify
4. Equality
5. Corponation
6. Koiranoksennus
7. Suburban Bliss
8. Renewables
9. Lazy Asses
10. Inhumane Treatment
11. Targets
12. Void
13. Insects
14. Ownership
15. Sharing
16. Nothingness
17. Slay
18. Western Cancer
19. Sell Your Soul
20. Salvation
21. Trashmonger
22. Science
23. Digital bliss
24. Inflation
25. Plan
26. Blind





BRUJERIA - LE CHAOS CHICANO (21h00) :
Le rideau tombe sur une scène où trône un drapeau mexicain. Vêtus de bandanas noirs, BRUJERIA fait une entrée fracassante. Fidèles à leur style, les musiciens mêlent brutalité et groove metal, offrant une prestation aussi engagée qu'explosive. L'ambiance dans le public est électrique, chaque chanson déclenchant un moshpit plus furieux que le précédent.
Changement d’ambiance donc avec l’arrivée de BRUJERIA, le super groupe de death grind méxicano-américain. Ce tour de chant a une saveur particulière : c’est un hommage aux deux chanteurs du groupe disparus en 2024, Juan Brujo et Pinche Peach. L’émotion est palpable, mais BRUJERIA ne se laisse pas abattre et livre un set puissant et habité. Et c’est un tout autre groupe que nous voyons par rapport à celui que nous avions vu au Hellfest mais les chansons demeurent aussi efficaces.
Dès leur apparition, le public semble changer de nationalité en parlant espagnol à tout se mélange à la fosse et fait exploser l’ambiance. Si le tempo est plus posé que chez ROTTEN SOUND, l’interaction est bien présente, tout en espagnol et en anglais. El Sangrón, au chant, impose une présence scénique remarquable et insuffle un groove envoûtant aux hymnes du groupe, abordant tour à tour rage, politique, sexe et narcotrafic.
Les musiciens, relativement statiques, assurent un son massif et percutant. El Criminal (Anton Reisenegger) déverse ses riffs tranchants, Zangano (Sergio Lopez) maintient une assise rythmique implacable à la basse, et El Sativo, fils de Juan Brujo, insuffle une puissance brute à la batterie.
Pas de crash pour les photos c’est donc dans la foule que je dois shooter avec des personnes qui se divisent en trois camp, " un photographe je te protège ", " je suis bourré et je t’emmerde " et les " je m’en fous je suis là pour le circle pit ". Le public scande les refrains espagnols, ponctués de "¡Cabrónes!" tonitruants. Le final est marquant : El Sangrón, qui a plusieurs reprises, a mimé des coups de fusils ou de pistolets, brandit une machette et lance " Matando Güeros ", avant de clore sur " Marijuana ”.
Un excellent set qui prépare idéalement à l’arrivée du headliner.

Set-list :
1. Brujerizmo
2. El Desmadre
3. Hechando Chingasos (Greñudos Locos II)
4. Vayan sin miedo
5. La Migra (Cruza la Frontera II)
6. Chingo de mecos
7. Cristo de la Roca
8. Desperado
9. Colas de Rata
10. La Ley de Plomo
11. Revolución
12. Consejos Narcos
13. Raza Odiada (Pito Wilson)
14. Matando Güeros
15. Marijuana





A peine sa machette rangée, je me rends auprès de mon amie tatoueuse Alexia CASSAR qui a pour particularité de ne tatouer quasi exclusivement que des tétons sur des patientes en rémission post cancer et mastectomie (https://thettonstattooshop.com). Membre du SNAT, nous échangeons sur les nouvelles encres.
En effet “ Depuis le 4 janvier 2022, aucune encre distribuée avant cette date sur le marché n'est conforme aux nouvelles règles de l'Union Européenne : Sans réelle alternative du côté des fabricants et des distributeurs, les tatoueurs européens se retrouvent dans une situation inédite, où la loi inspire désormais le chaos bien plus que l'harmonie. ” (Communiqué du SNAT). Le SNAT a ainsi saisi la juste européenne. C’est finalement dans un contexte morose que se tient le Mondial qui accuse également le coup du Covid.




CARCASS - LE DEATH METAL DANS TOUTE SA SPLENDEUR (22h00) :
Les légendes britanniques CARCASS prennent possession de la scène avec une précision chirurgicale. À 40 ans de carrière, le groupe n'a rien perdu de sa verve. Jeff Walker, avec son charisme habituel, harangue la foule, et Bill Steer enchaîne des solos acérés. " Buried Dreams " et " Incarnated Solvent Abuse " rappellent à quel point CARCASS a influencé le death metal mélodique, tandis que " Corporal Jigsore Quandary " et " Exhume to Consume " déclenchent un carnage dans la fosse.
Dès les premières notes de l’intro, l’ambiance devient électrique. CARCASS, pilier du death metal britannique, fait son entrée sous une acclamation assourdissante. Dan Wilding s’installe derrière les fût, James "Nippy" Blackford ajuste sa guitare, et enfin, les figures emblématiques du groupe apparaissent : Bill Steer, toujours fidèle à son look, et Jeff Walker, arborant une nouvelle apparence sans ses mythiques cheveux longs mais toujours avec son jeu de basse à la verticale à certains moments.
Dès " 1985 " et " Buried Dreams ", la fosse s’enflamme, se transformant en un pit furieux. CARCASS déploie un set rétrospectif couvrant toute sa carrière, de " Reek Of Putrefaction " (1988) à " Torn Arteries " (2021), avec une mention spéciale pour l’iconique " Heartwork " (1993). Les circle-pits et les slams se multiplient, et Jeff Walker, toujours communicatif, asperge la foule d’eau, balance des bouteilles d’eau et visiblement se loupe car rigole à pleine gorge en s’excusant avant d’envoyer " Genital Grinder ". Contrairement aux deux premiers groupes, la foule est plus dense et comme il n’y a pas de pit, je prends de la distance, retrouvant Laurent Karila près du soundboard puis de la hauteur et c’est aux côtés de l’hôte de la soirée, Tin-tin que je finis le set depuis l’escalier central permettant de prendre conscience de la scéno et du Chaos engendré par le quatuor.
Bill Steer enchaîne les solos avec une facilité déconcertante, tout en assurant les chœurs avec une précision chirurgicale. Dan Wilding, derrière sa batterie, livre une performance millimétrée, tandis que James Blackford, très proche du public, exécute ses parties avec une rigueur exemplaire.
La tension ne redescend jamais, et CARCASS maintient la pression jusqu’au bout. Entre les riffs heavy de " Swansong " (1995) et " Surgical Steel " (2013) et l’agression death-grind de " Symphonies Of Sickness " (1989), le public vit un tourbillon d’émotion brutale. Les sourires sur les visages des musiciens et les échanges de médiators à la fin de chaque titre montrent un groupe heureux d’être là et d’offrir un moment inoubliable.
Après 75 minutes d’intensité pure, CARCASS laisse derrière lui une foule lessivée mais comblée. Ce " Europa Rigor Mortis Part 1 " restera gravé dans les mémoires comme une soirée d’anthologie pour tous les amateurs de metal extrême. La halle se vide, les machines à tatouer sont silencieuses, il est temps de quitter cette bulle.

Set-list :
1. 1985
2. Buried Dreams
3. Kelly's Meat Emporium
4. Incarnated Solvent Abuse
5. No Love Lost
6. Tomorrow Belongs to Nobody / Death Certificate
7. Dance of Ixtab (Psychopomp & Circumstance March No. 1 in B)
8. Black Star / Keep On Rotting in the Free World
9. Genital Grinder
10. Pyosisified (Rotten to the Gore)
11. Exhume to Consume
12. 316L Grade Surgical Steel
13. This Mortal Coil
Rappel :
14. Corporal Jigsore Quandary
15. Tools of the Trade
16. Drum Solo
17. Ruptured in Purulence / Heartwork





UNE NUIT OÙ L'ART ET LE METAL SE SONT ENTRELACÉS :
Entre l'effervescence des tatoueurs et la puissance sonore des groupes, cette soirée restera gravée dans les esprits. Le Mondial du Tatouage a réussi son pari : mêler l'art corporel et la musique extrême pour une expérience unique.
Mention spéciale à Tin-Tin pour l'organisation, et rendez-vous pour la prochaine édition !

Merci Simon et toute l’équipe de com’ pour l’accréditation.


(Review et photos réalisées par Djaycee)

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