KIM + GODZILLA OVERKILL
Paris le 15/12/17
(La Boule Noire)


GODZILLA OVERKILL commence son set par Le Kyrie, dont le nom vient du grec ancien, c’est une prière liturgique des Églises catholique et orthodoxe. Compte tenu de la réputation que l’artiste s’est faite sur internet : " plus belliqueux, ses morceaux ressemblent à ce vieil alcoolo de 55 ans qui sort du PMU saoul en cherchant la baston : impulsifs et vraiment dangereux ", il est fort vraisemblable que ce Kyrie sera dévoyé, mal mené. En effet le chanteur en rangers, kilt et foulard Hermès ne parait pas "très catholique ". Vocoder en bandoulière, les premières boucles de samples résonnent dans la Boule Noire. GODZILLA OVERKILL poursuit ensuite avec un " j’arrive seul, je pars seul " et effectivement il est dans son monde qui est bien éloigné du côté pop lumineux de KIM. Nous sommes ici sur des beats lourds et sombres. " Je ne dors plus, je ne rêve plus, je ne mange plus " comme un leitmotiv est répété à l’infini sur des beats qui tachent.
GODZILLA OVERKILL poursuit dans " la poésie " avec " si je meurs, ce sera entre tes cuisses " nous éloignant définitivement de la finesse musicale de la tête d’affiche de ce soir. La catharsis est grande dans ce set " moi quand je serai grand, je ferai comme mon père ", le public a l’impression de servir de psy à GODZILLA OVERKILL, qui, dans son exutoire, prend parfaitement la pose du « vieil alcoolo de 55 ans qui sort du PMU saoul en cherchant la baston » à sortir des insanités. Chaque mot positif est contrebalancé par son opposé " je ne rêve plus que de l’amour, je ne parle plus que de la mort " …
Sur un " danse avec moi, rêve avec moi ", le public serait presque prêt à la suivre mais la libido de GODZILLA OVERKILL vient troubler ce morceau comme si dans son monde rien de beau n’était durable. Sur " Ma ville mon Graal " - introduit par un " j’espère que vous êtes prêts à vous taper dessus, après il y aura des vrais musiciens " - offrande à sa ville " Marseille, Marseille ma vieille maitresse, je fais ma messe sur tes fesses ". La chanson se fait pourtant presque mélodique et les beats entêtants mais on ne peut que conclure sur que la réputation que GODZILLA OVERKILL a acquis n’est pas usurpée. Sorte de prédicateur nymphomane de la mort dopé aux foulards Hermès, son monde est tellement " Hermé(s)tique " qu’à chaque fois que le public fait un pas vers le monde de GODZILLA OVERKILL et ouvre une porte de celui-ci, il la referme instantanément car tellement anxiogène, détruisant le beau comme ce foulard Hermès pour essuyer les larmes.

Set-list :
Kyrie
JNRP
Les Epines
Extrasy
Hermès
Comme un amour Krokodil
Ma ville mon graal



Arrive enfin KIM, qui présente son 32e album sorti chez MIDNIGHT SPECIAL RECORDS quelques semaines avant cette date parisienne. KIM avait prévenu que cette date serait sur le mode de l’improvisation ayant choisi de très bons musiciens pour l’accompagner et constitué en backing band " la PIZZA " : CLEA VINCENT au piano, Blandine Millepied du groupe SAHARA à la basse, BATIST à la Guitare et Raphaël Léger à la batterie.
KIM a embrigadé une partie des musiciens de MIDNIGHT SPECIAL RECORDS sur scène. Le Chef d’orchestre commence le set par quelques secondes de blanc avant de lancer ses musiciens qui démarrent au quart de tour sans sur " Indian bazar ". En effet, le groupe n’a pas de setlist ce soir, juste KIM en MC qui lance ses musiciens au hasard sur une des chansons de son dernier album ou sur une autre parmi les centaines que l’artiste prolixe a écrites. Quelques accords de " Ad libitum Melo " pour un morceau plus pop et le all star band derrière lui qui assume le sobriquet de " la PIZZA ". Le groupe passe ainsi d’un morceau rock à morceau pop-ragga, flirtant avec le reggae. KIM lance un " ragga " certainement pour lancer un bœuf ragga qui fait son effet, la voix de KIM est multiforme et les chœurs superbes de CLEA VINCENT et de la chanteuse de SAHARA s’entremêlent et virevoltent. Ce titre issu de l’album " Blues de geek Manifesto ", tout comme le premier est superbe. " La prochaine chanson va être chantée par CLEA VINCENT et Blandine ", les deux femmes sont surprises mais entonnent ensemble sans broncher " Soldiers of creation " donnant une autre perspective à cette chanson issue de son album " Ballads ".
Après une présentation de LA PIZZA et des remerciements à Victor et MARIUS ASHTRAY de MIDNIGHT SPECIAL RECORDS. KIM explique le fonctionnement de la soirée et indique qu’à certains mots clé ou certains gestes, la PIZZA doit répondre par des accords ou des improvisations. Il lance ensuite " Nowhere Carroussel " qui nous emporte dans un lieu secret entre de la french pop à la PHOENIX, du rock à la WHITE STRIPES et du reggae grâce à la basse ronflante de Blandine. " I warn you, there’s a riot going on ", le riot en question c’est la Boule Noire qui s’enflamme derrière ce showman largement sous-estimé qu’est KIM. La PIZZA sublime les compos de KIM pour les rendre plus brutes en live.
KIM appelle ensuite CARMEN MARIA VEGA pour le rejoindre sur un duo frénético tribal " Tropical Mango " alternant intervalles calmes et punchs rock hysterico punks. Le sol de la Boule Noire tremble sous ce cataclysme rock. BATIST, plus rock sur sa carrière solo, s’en donne à cœur joie pour qu’une déferlante rock accompagne la danse épileptique de CARMEN MARIA VEGA. Les moments calmes sont compensés par la déflagration de larsens qui suit. Vocalise par temps calme, hurlement pendant la tempête, cette mangue est aussi tropicale que le climat du pays dans lequel elle pousse. CARMEN MARIA VEGA quitte la scène en laissant KIM avec une marque de rouge à lèvres dans le coup qui lui restera jusqu’à la fin du set, comme une séquelle de ce morceau qui n’a laissé personne indifférent.
Retour sur une chanson du dernier album " Rachel from Aleppo " qui invite le public à accueillir les personnes exilées. Ce morceau pop reggae est aux couleurs de la pochette de son dernier LP, vert jaune rouge mais avec forcément un côté geek. KIM lance BATIST dans un solo plus rock face à cette basse reggae, la batterie de Raphaël étant, comme toujours, millimétrée. Ce morceau, en plus de son message humaniste fort, est une superbe composition. Vient ensuite " Old borders shaking ", les vieilles frontières tremblent en effet, nous gardons le même thème que précédemment, comme quoi la géopolitique peut aussi être source de composition de superbes chansons. KIM est rejoint par Valérie Hernandez de SQUEEZE ME I SQUEAK et YOUSSEF ABADO chanteurs et coauteurs de cette chanson. Cette chanson, ici chantée en trio comme sur le disque, est remarquable par son coté caléidoscopique, les trois moments de la chanson de styles différents avec notamment le chant rappé de YOUSSEF ABADO. KIM en rajoute en lance un défi d’impro jazzy à la PIZZA sans que personne ne s’en rende compte et surtout sans dénaturer la chanson originale.
Vient ensuite " Panorama parano panoramic Banana " où KIM est seul à la guitare, cette chanson rappelle un peu SUPERTRAMP par certaines intonations de voix avant de s’en détacher complètement. Un ange passe dans la Boule Noire puis la guitare se fait plus distordue. Preuve si besoin en était que KIM excelle dans tous les genres de musique et devrait, s’il y avait une justice, remplir des salles beaucoup plus grandes que la Boule Noire avec la configuration " PIZZA ". Pas de transition et les derniers accords en solo se mêlent avec les premiers de " Where the horses run free ", la PIZZA prend le train en marche et rejoint KIM avec une aisance qui est encore une fois la preuve que malgré ce surnom étonnant – tout comme l’est KIM – les musiciens super bons. Un crescendo se fait, KIM se fait plus incisif dans ses riffs, sa voix plus abrasive, aussi à l’aise dans les graves rocks que dans les aigus perchés. Pas de répit entre cette chanson et le très punk-rock " Ice cream " scandé en quasi duo avec Blandine. Ce titre issu de l’album " Kim… is Dead " a un interlude pendant lequel KIM garde sa guitare en bandoulière tout en jouant du clavier micro tonal. La basse et la batterie gardant le rythme effréné de la structure punk de la chanson. Le clavier micro tonal se fait sirène de police étirant la chanson sur près de 10 minutes, loin des standards punks, inférieurs à trois minutes. La chanson se termine dans une déflagration punk au grand plaisir du public.
Sur " Henela rose Ballad ", KIM se met au clavier de CLEA VINCENT qui part dans les coulisses faute d’instrument et KIM fait la promo des différents artistes l’accompagnant ce soir, en parfait altruiste qu’il est. CLEA VINCENT reprend son instrument, échangeant quelques accords à quatre mains, la chanson repart, la PIZZA démarre toujours quand il faut. Ce titre pop est enchainé avec " Solenn " présent sur le disque " Ballads ", même si le titre est superbe, il porte un thème lourd celui de la mort de Solenn Poivre d’Arvor atteinte d’anorexie mentale. Là encore la chanson n’a plus la notion du temps, elle s’allonge, s’étend dans ses improvisations. Le temps d’aller vérifier la petite pendule, la chanson " I’m Getting old " débute ; elle revient sur le versant rock de la carrière de KIM issu de " Radio Lee Doo " et que BATIST avait hâte de jouer. KIM se fait ACDC, WHITE STRIPES et quasi métal dans cette chanson, de manière tout à fait antinomique avec la ballade précédente. Ce qui est appréciable chez KIM c’est cette discographie pléthorique dans laquelle il peu piocher une chanson dans quasiment chaque style existant. KIM est également multi instrumentiste ce qui explique ce don pour faire les meilleures chansons quelques soient le style. " Without you ", titre de Danny Kirwan, guitariste de FLEETWOOD MAC, assez blues et figurant dans son précédent album de reprises, est lancé. KIM demande un solo à CLEA VINCENT au milieu de la chanson qui s’exécute avec brio.
KIM sollicite " un petit disco à 125 " à Raphael Léger, " un truc en fa dièse mineur " à Blandine pour lancer une chanson que la PIZZA n’a pas répétée, " The oriental Jasmine ". KIM a le goût du risque mais aussi toute confiance en son backing band. Le public reprend le refrain en chœur, notamment Marius co fondateur de MIDNIGHT SPECIAL RECORDS. Un dernier regard au petit réveil " il reste 5 min, la prochaine est pour les retardataires ". KIM décide de rejouer " Ad libitum Melo " mais cette fois-ci avec tous les artistes et amis qui ont chanté sur " Ballads " sorte de backing band deluxe pour terminer la soirée en beauté. La chanson n’a rien à voir avec la première interprétation, Valérie Hernandez de SQUEEZE ME I SQUEAK, YOUSSEF ABADO, CARMEN MARIA VEGA, ALB, Marius, Victor et bien d’autres (la scène de la Boule Noire étant trop petite pour que tous soient visibles). Avec des chœurs comme ceux-ci, la chanson se termine quasi a capella et nous aurions presque envie de détruire ce réveil sonnant l’heure de la dernière chanson tant ce concert est intense.
A noter que KIM avait demandé à ce que le concert soit filmé par tous pour lui permettre de toucher plus de programmateurs. En effet, KIM n’est pas un chanteur stéréotypé, qu’il est impossible de mettre dans une case particulière. KIM n’est pas un produit marketing labelisable mais bel et bien un artiste qui fonctionne au feeling. En plus de cela, KIM est une belle personne, respectueux du curfew et du régisseur du lieu, il est le premier alors qu’il a rempli la Boule Noire à faire plier le matériel et libérer le backstage.
A l’issue de ce concert, je me pose juste une question ; pourquoi ne l’ai-je pas vu sur scène avant ?

Set-list:
Indian bazar
Ad libitum Melo
Soldier of creation
Nowhere carroussel
Tropical mango
Racha from Aleppo
Old borders shaking
Panorama parano panoramic Banana
Where the horses run free
Ice cream
Henela rose Ballad
Solenn
I’m Getting old
Without you
The oriental Jasmine
Ad libitum Melo




Un grand merci à Midnight Special Records pour leur confiance renouvelée. Merci à Kim pour sa disponibilité et la publication de certaines de mes vidéos sur Youtube. Merci à tous les artistes de Ballads et à ceux avec qui j’ai échangé et merci Mathias pour le " Forza " sur " le journal d’un vampire en Pijama ".


(Review et Photos réalisées par Djaycee)

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